Vente le
25 janvier 2022 - 14:00 (CET) -
Salle 1-7 - Hôtel Drouot - 75009
Quittant son appartement du 9e arrondissement de Paris, Stéphane Bern met en vente tout son mobilier qui surprendra par son éclectisme, mélangeant XVIIIe et design.
Le salon de l'appartement de Stéphane Bern dans l'hôtel Rousseau associe notamment un tableau attribué à Martin Van Meytens (1695-1770), Portrait de l’impératrice Élisabeth-Christine de Brunswick-Wolfenbutte […] (20 000/30 000 €), et un lustre Astrolabe d’Hervé Van der Straeten (12 000/15 000 €).
Le salon de l'appartement de Stéphane Bern dans l'hôtel Rousseau associe notamment un tableau attribué à Martin Van Meytens (1695-1770), Portrait de l’impératrice Élisabeth-Christine de Brunswick-Wolfenbutte […] (20 000/30 000 €), et un lustre Astrolabe d’Hervé Van der Straeten (12 000/15 000 €).
D’aucuns avaient prédit que le monde d’après la Covid ne ressemblerait pas à celui d’avant», rappelle Stéphane Bern. En ce qui le concerne, cela s’est matérialisé par un déménagement dans le Perche et la vente de son appartement parisien, au sein de l’hôtel Rousseau dans le 9e arrondissement. Il a vécu durant quarante ans à Paris, dont dix-huit dans ce lieu historique construit au XVIIIe siècle par l’architecte Pierre Rousseau pour être sa maison de villégiature, où vécurent par la suite Victor Hugo ou Eugène Isabey. C’est une nouvelle page de l’histoire personnelle de Stéphane Bern qui se tourne. Le «monsieur Patrimoine» hexagonal en a surpris beaucoup avec ce choix d’emménager définitivement dans le collège royal et militaire de Thiron-Gardais, dans l’Eure-et-Loir, qu’il a acquis en 2012 et restauré depuis à grands frais. Mais la décision s’est s’imposée naturellement à lui au sortir des confinements qu’il a passés à la campagne, profitant enfin pleinement de ses «animaux et de son jardin, vivant au rythme des saisons». Ce changement de vie s’accompagnera d’un changement de style. «Ma maison du Perche étant déjà meublée, j’ai pris la décision de vendre tout le mobilier de mon appartement de l’hôtel Rousseau», explique-t-il. Stéphane Bern n’a donc emporté avec lui que ses archives et les quelque quinze mille livres de sa riche bibliothèque… Cette vente participera de plus au financement des différents travaux débutés dans le Perche et qui vont se poursuivre avec la restauration du colombier du XVIe et celle des futures salles d’expositions temporaires du foyer paroissial. Ainsi est-ce une aventure patrimoniale personnelle, un laboratoire qui lui permet de voir comment s’effectue la restauration d’un tel joyau historique, sans solliciter de subventions publiques de surcroît.
Hubert Le Gall (né en 1961), deux tables Marguerite dix fleurs en bronze patine noire, base rectangulaire d’où s’élèvent dix fleurs, marque de fondeur, signature du cachet «Le Gall», numérotées «EA 1/4» et datées 2007, 50 x 49 x 34,5 cm. Estimation : 10 000/12 000 € Du XVIIIe et du design «Si je rapportais tout ce que j’ai aimé à Paris durant les vingt dernières années dans ce collège, cela n’aurait pas de sens, confirme Stéphane Bern. D’autant que les pièces sont finalement plus petites et que cette maison n’a rien d’un intérieur parisien.» Ce dernier, chacun le découvrira avec plaisir, et surprise peut-être, puisqu’il est le fruit d’une hybridation réussie entre le mobilier ancien, essentiellement Louis XVI, et des meubles contemporains. «Jacob compte parmi mes menuisiers et ébénistes préférés», affirme l’animateur de «Secrets d’histoire». Un penchant confirmé par la présence dans la vente d’une paire de chaises Louis XVI à dossier médaillon estampillées «G. Jacob», dont on attendra 2 000/3 000 €, ainsi que d’une autre d’époque Empire à dossier bandeau, attribuée à l’ébéniste et provenant du château de Neuilly, demeure de Louis-Philippe, duc d’Orléans (1 500/2 000 €). Lignes épurées et élégance sont les qualités communes aux nombreux sièges et meubles Louis XVI de cet ensemble, marqué par un guéridon en placage d’acajou estampillé Canabas, prévu à 5 000/6 000 €, mais aussi par un bureau plat en placage d’acajou estampillé Adrien Antoine Goselin, annoncé à 10 000/15 000 €.
Hervé Van der Straeten (né en 1965), pouf Capsule, vers 2005, aluminium verni. 35 x 58 cm. Estimation : 1 800/2 000 €
Stéphane Bern est proche de la plupart des designers contemporains dont les créations truffent son appartement. Ils ont réalisé spécialement pour lui plusieurs pièces, à l’image de Stefan Mocanu, fondateur d’Arte Fabrica en 2003, qui exécuta un tapis en laine d’après un dessin de Geta Mocanu (3 000/4 000 €), une console en métal à l’imitation du bronze dans le goût de Giacometti, ornée sur l’entretoise d’un picador et d’un taureau (5 000/6 000 €), et enfin une grande table basse ovale au plateau émaillé à décor floral et métal sur âme de bois enchâssé dans une galerie de bronze (même estimation), qui trônait dans le salon et qui fut l’ultime objet acquis pour l’hôtel Rousseau. Quels furent les premiers achats ? Deux lampes d’Hubert Le Gall du modèle Allusion créé en 1997, en bronze patiné et abat-jour en tissu blanc, issues d’une édition limitée à 99 exemplaires (1 500/2 000 € pièce). Avec le designer lyonnais, qu’il connaît depuis trente ans, Stéphane Bern partage le goût de la nature et une certaine fantaisie. Hubert Le Gall intègre dans ses meubles un fabuleux bestiaire mais aussi un riche herbier, duquel se distinguent ses chères marguerites qui forment les tables en bronze à patine noire dites Marguerite dix fleurs, dont deux exemplaires numérotés «EA 1/4» et datés de 2007 sont annoncés à 10 000/12 000 €. Une création devenue emblématique de cet artiste courtisé tant par les musées, pour ses scénographies, que par les particuliers ou la Mairie de Paris. Dans le salon de l’hôtel Rousseau (voir photo d'ouverture), ce décor éclectique était éclairé par un lustre Astrolabe d’Hervé Van der Straeten, en bronze patiné et doré en forme de sphères, une pièce unique du chouchou des grands couturiers et des artistes — spécialisé dans le luminaire et le mobilier, où le travail du bronze, réalisé dans ses propres ateliers, a la part belle (12 000/15 000 €). Sur les murs se détachait plus particulièrement un monumental Portrait d’Élisabeth-Christine de Brunswick-Wolfenbüttel, mère de Marie-Thérèse d’Autriche et grand-mère de Marie-Antoinette, dont l’attribution est passée de Carl Van Loo à Martin Van Meytens, peintre à la cour de Vienne à partir de 1732 (15 000/20 000 €). Si le lustre a été commandé au designer par Stéphane Bern grâce à une cagnotte réunie par ses amis à l’occasion de son 50e anniversaire (il acheta ensuite un pouf Capsule, prisé 1 800/2 000 € et une lampe Épine 178, à 4 000/6 000 €), le portrait fut acquis lors d’une vente de la maison Dorotheum à Vienne en 2014.
Époque Louis XVI. Fauteuil estampillé par le menuisier Sulpice Brizard (1733-après 1796), en bois mouluré, sculpté et doré, à dossier enveloppant, assise tournante. 88 x 65 x 54 cm. Estimation : 5 000/7 000 €
Incontournables têtes couronnées Personnalité du maître des lieux oblige, têtes couronnées et princes de sang seront au rendez-vous dont, côté peinture toujours, un Portrait de Louis XVI portant l’ordre du Saint-Esprit et la Toison d’or, attribué à Martin Drölling et attendu à 3 000/4 000 €, ou un Portrait de Madame Sophie, fille de Louis XV, attribué à Louis Michel Van Loo, attendu à 3 000/5 000 €. «Habile à la cour et pleine d’esprit et d’énergie» d’après Saint-Simon, Adélaïde de Savoie, duchesse de Bourgogne et mère de Louis XV, est quant à elle le sujet du tableau d’un artiste de l’école piémontaise vers 1680 (5 000/7 000 €). L’affection toute particulière de l’animateur envers la famille royale anglaise se devine au travers d’une épreuve argentique d’époque d’un Portrait du prince Édouard, alors prince de Galles puis roi Édouard VIII puis duc de Windsor en grand uniforme de prince de Galles tenant le bonnet de fourrure dans la main droite et l’épée d’apparat dans la gauche, photographié par Hugh Cecil Saunders (1 500/2 000 €). Mais, on l’aura compris, Stéphane Bern est un homme et un collectionneur surprenant à plus d’un titre… En témoigne, pour finir, un Paysage boisé d’Eugène Boudin, qui sera à envisager à 12 000/15 000 €.
Estimez-vous être un véritable collectionneur ou achetez-vous pour décorer votre intérieur ? L’achat des tableaux relève plutôt de la collection tandis que celui du mobilier tient davantage de la décoration et du sens pratique, même si je conserve toujours un souci de l’esthétique. Mon goût me porte plutôt vers le style Louis XVI mais pour un plus grand confort, je n’hésite pas à me tourner vers des créations contemporaines. Mon intérieur était assez chaleureux. L’hôtel Rousseau avait été transformé en bureaux, et j’ai restauré au mieux la partie que je possédais afin qu’il retrouve son apparence de «maison du XVIIIe ». Je trouve le style Louis XV trop chargé. Ce que j’aime dans le Louis XVI, ce sont les lignes épurées, l’élégance et un certain confort bourgeois. C’est une époque où cette classe sociale émerge en France et réclame une aisance et un luxe nouveaux dans son intérieur.
Vous avez choisi de vendre votre collection à l’Hôtel Drouot. En voisin ? Oui, c’est un lieu que je connais bien. J’ai été parrain du Carré Drouot et des Trois jours du Quartier Drouot. Également investi pendant des années au sein de la mairie du 9e arrondissement, à la culture notamment, je ne me voyais d’ailleurs pas vendre dans un autre endroit. Je mangeais régulièrement le samedi midi à la Cave Drouot… c’est mon quartier. J’allais y voir les expositions puis j’achetais en ligne ou par téléphone, car j’ai peu de temps et il est toujours délicat quand on est connu de se montrer en salle des ventes, cela peut fausser le jeu. Je suis également un habitué des ventes royales de Dorotheum à Vienne, où j’ai acquis en 2014 le portrait de l’impératrice Élisabeth-Christine de Brunswick-Wolfenbüttel. On y retrouve le grand style XVIIIe qui a fait fureur dans les cours d’Europe. Cet achat correspond également à l’époque où je travaillais avec Franck Ferrand sur un ouvrage cherchant à réhabiliter la peinture de cour. J’ai commencé à acheter, durant cette année de collaboration, de la peinture de cour et des objets royaux. Ce tableau donnait beaucoup de personnalité à mon salon. C’est mon objet favori, ma «masterpiece», mais malheureusement je ne saurais où le mettre dans ma nouvelle maison…
Votre goût pour le mobilier contemporain et design va sans doute surprendre. Qu'aimez-vous dans les créations de Van der Straeten ou Le Gall ? Ce sont des lignes. Ces créateurs sont inspirés de l’histoire, ils sont très cultivés. Ils réinterprètent le passé en épousant leur époque. Ils ont un esprit et une inventivité très personnels. Et leurs créations se marient très bien avec le style Louis XVI. Même la console, la table et le tapis du salon que Stefan Mocanu a fait spécialement pour moi se concilient très bien à cet intérieur XVIIIe. C’est bien de surprendre son monde ! Le «total look» n’a pas de sens… comme les personnes habillées de la tête aux pieds en Dior ou en Chanel, ce sont des gens qui manquent d’assurance. Je ne dis pas que j’ai de l’assurance mais j’aime le mélange des styles.
Votre goût pour la collection et les objets vous est-il venu en même temps que celui pour l’histoire et le patrimoine ? Cela m’est venu il y a très longtemps, en effet. J’avais un goût différent de celui de mes parents. Ils se meublaient dans le style des années 1970, qui ne me plaisait pas forcément. Mais ils m’ont inspiré le goût de l’achat et des objets. Mes parents nous emmenaient, mon frère et moi, voir toutes les expositions. Ils nous ont initiés à l’art et à la beauté. Notre œil a été exercé. Même si l’on n’était pas très aisés, j’ai eu la chance de naître au sein d’une famille où l’on partageait l’amour de l’art et de la culture. Je me souviens, quand j’avais 16 ans, j'ai demandé à ce qu'on m'offre une gravure ancienne du XVIIIe siècle… que je garde toujours avec moi. Par ailleurs, j’ai hérité d’un Oeil de l’artiste cinétique Agam et je l’ai associé au reste de mon intérieur. Avec le temps, on est moins arc-bouté sur un style et on s’ouvre à d’autres horizons.
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