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Une «Flâneuse» aux courbes énergiques

Publié le , par Philippe Dufour
Vente le 26 octobre 2018 - 13:00 (CEST) - 31, boulevard d'Alsace - 06400 Cannes

Emblématique des pièces vendues par La Maison moderne de Meier-Graefe et imaginé en 1902, ce siège rare d’Abel Landry rejoint le musée d’Orsay.

Abel Landry (1871-1923), fauteuil «Flâneuse» modèle «43» 1902, bois sculpté verni,... Une «Flâneuse» aux courbes énergiques
Abel Landry (1871-1923), fauteuil «Flâneuse» modèle «43» 1902, bois sculpté verni, 102 x 74 cm.
Adjugé : 8 250 €

S’il n’a pas remporté la première place dans la liste des adjudications lors de la vacation cannoise du 26 octobre (voir Gazette n° 38, page 159), un fauteuil hors du commun était peut-être la véritable star du jour. Cette assise, créée en 1902, provient d’une collection des Alpes-Maritimes, et porte, outre le qualificatif technique de «modèle 43», celui plus séduisant de «Flâneuse». De fait, elle a bénéficié de l’intérêt enthousiaste d’un musée d’Orsay prêt à débourser 8 250 €, et va bientôt rejoindre les espaces consacrés à l’art nouveau du grand vaisseau parisien.
Un dessin nerveux comme une épure «design»
On doit ce fauteuil au talent méconnu d’Abel Landry, architecte et décorateur, qui s’affirme, au tournant du XXe siècle, comme l’un des protagonistes originaux de ce bref moment de l’histoire des formes. Il est vrai que l’homme occupe une place un peu à part, relevant de la mouvance parisienne du mouvement ; aux côtés d’Henry Van de Velde, Paul Follot, Maurice Biais ou Maurice Dufrêne, il travaille pour La Maison moderne, une galerie fondée en 1899 par le critique d’art, d’origine allemande, Julius Meier-Graefe. Cette boutique dans le vent devait faire concurrence à la mythique Maison de l’art nouveau, ouverte à Paris en décembre 1895 par son compatriote Samuel Bing, qui avait défendu les créations de Tiffany ou encore celles de Georges de Feure. Dans sa galerie, Meier-Graefe montrait une autre voie possible pour cette expression nouvelle basée sur des formes organiques, différente de celle de Guimard ou de l’école de Nancy. Une belle illustration en est notre siège aux lignes vigoureuses, caractéristiques du travail de Landry, s’appuyant toujours sur une solide structure de courbes tendues, soulignées de moulurations sobres. La pièce est extrêmement proche du Fauteuil renversé, réalisé par Biais la même année, et également vendu par La Maison moderne. Acquise par le musée d’Orsay en 2016, cette pièce s’avère plus radicale encore par son absence totale d’ornementation, alors que notre « Flâneuse »  plus féminine comme son nom semble l’indiquer , porte de discrets éléments organiques à ses extrémités et jonctions, inspirés par des feuilles de ginko. Tous deux témoignent en tout cas d’un véritable travail sur la fonction même du siège, qui préfigure les recherches des futurs designers ; en résultent un dossier incliné vers l’arrière, de larges accotoirs et un coussin repose-tête manquant ici  fixé à une tige métallique en partie haute.  «Il s’agit d’une pièce que l’on recherchait : elle illustre parfaitement un courant français encore peu présent dans nos collections», précise Élise Dubreuil, conservatrice des arts décoratifs au musée, évoquant même des influences venues de plus loin, du nord ou du centre de l’Europe.
Des contrastes de matière
«Le choix du matériau est également révélateur : l’ébéniste a choisi du hêtre et non une essence précieuse, ce qui l’inscrit dans une démarche moderne de fonctionnalité et d’accessibilité», poursuit la spécialiste. Elle fait encore remarquer que, «véritable marque de fabrique de Landry, la sobriété de la structure du fauteuil était contrebalancée par sa précieuse garniture d’origine, aujourd’hui disparue : du cuir gravé avec applications de motifs de soie». Un autre exemple de ces contrastes chers à l’ébéniste est connu grâce à une illustration parue dans le catalogue de la Maison moderne de l’année 1901 : on y voit une chaise en bois naturel recouverte de peau de chamois clair agrémentée d’applications de broderie… 

vendredi 26 octobre 2018 - 13:00 (CEST) - Live
31, boulevard d'Alsace - 06400 Cannes
Pichon & Noudel-Deniau (Azur Enchères)
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