Voilà quarante ans que ce peintre, graveur, sculpteur et photographe se souvient. Splendeurs et misères passées infusent son art actuel, appliqué, hors catégorie. Rencontre dans son quartier général, plein de machines grégaires toujours en état de marche.
Au pied de la tour Montparnasse, crêperies, commerces et cinémas occupent le terrain, jadis asile bohème. Quelques irréductibles résistent aux modes de passage. Idem est de ceux-là. Nichée au fond d’une cour pavée, cette imprimerie d’art, fondée en 1881 par Eugène Dufrénoy, abrite encore les presses de Fernand Mourlot, usées par Matisse, Braque, Chagall ou Picasso. Leurs fantômes flottent dans l’air, plein d’odeurs primaires, de résidus d’encre, de bois et de poussière. En haut d’un vieil escalier, dont les marches grinçantes se gravissent d’un pas mal assuré, surgit Jean-Michel Alberola, cheveux en bataille et sourcils inquisiteurs, d’office offensés. Il ne quittera pas son manteau, noir comme la chaise où il s’entortille, évoquant à voix basse, presque contre son gré, son actualité : un seizième solo chez Daniel Templon , son fidèle galeriste, qui provoquait en 1982 sa rencontre avec les lieux. Il y vient depuis quand bon lui semble, quand il ne fait pas demi-tour, prolongeant les préliminaires, tout aussi – sinon plus – importants que le passage à l’acte. « Je suis une salle d’attente », philosophe ce sphinx dont l’art est une énigme, un rébus, une balle lancée loin qu’il faut aller chercher. À trois reprises, la fine équipe de Patrice Forest, directeur d’Idem,…
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