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La petite musique d’Ivan Mestrovic

Publié le , par Philippe Dufour
Vente le 15 août 2019 - 14:30 (CEST) - 73, boulevard de La Croisette - 06400 Cannes

Vénéré en son pays et reconnu mondialement, ce grand sculpteur croate du XXe siècle est rarement présenté dans l’Hexagone. Gageons qu’avec ce haut-relief qui lui est attribué, il retrouvera une place méritée dans le cœur des collectionneurs.

Attribué à Ivan Mestrovic (1883-1962), La Femme à la harpe, panneau sculpté en haut... La petite musique d’Ivan Mestrovic
Attribué à Ivan Mestrovic (1883-1962), La Femme à la harpe, panneau sculpté en haut relief, 170 55 cm.
Estimation : 25 000/30 000 

La figure féminine aux yeux mi-clos, et comme envoûtée par les sons de sa harpe, se souvient de l’esthétique symboliste ; ce que souligne encore la ligne en «S» de la silhouette, aux courbes et contrecourbes tout en rondeurs. Son auteur supposé, Ivan Mestrovic, l’un des plus grands sculpteurs croates modernes, l’aurait pourtant imaginée autour de 1932, ce qui l’inscrirait plutôt dans le retour à l’antique qui marque la décennie commençante. Si ce haut-relief monoxyle (car ciselé dans un seul et épais morceau de bois), d’une puissante taille directe, ne porte pas de signature, on lui connaît deux répliques qui permettent de le resituer dans l’œuvre de l’artiste. Ainsi, une Femme à la harpe identique, mais en marbre blanc, peut être admirée sous le portique ionique de la galerie Mestrovic de Split, en Croatie ; il s’agit du musée dédié au plasticien, installé dans la somptueuse villa qu’il s’est fait bâtir avant la dernière guerre. Un autre exemplaire de l’œuvre est conservé par le musée national d’Art moderne, au centre Georges-Pompidou, sous le numéro d’inventaire «JP 87 S». Cette version s’avère être un grand relief en bronze, un achat direct de l’État français à l’artiste en 1932. On a pu le redécouvrir entre 2013 et 2015, présentée au sein du nouvel accrochage des collections du MNAM, intitulé «Modernités plurielles». À la suite de l’expert Marc Lallement, on peut donc se demander si notre panneau ne serait pas l’œuvre préparatoire à ces deux pièces répertoriées.

Un artiste reconnu internationalement
Né dans une famille modeste de Vrpolje en Slavonie, Ivan Mestrovic sujet de l’Empire austro-hongrois étudie la sculpture à partir de 1901, à l’Académie des beaux-arts à Vienne ; il expose dès lors dans les manifestations de la Sécession, dont il devient membre en 1906. Deux ans plus tard, c’est Paris et l’amitié avec Auguste Rodin ; ce dernier se dit fortement impressionné par le travail du Croate, présenté au Salon d’automne, et le décrit même comme «le plus important phénomène parmi les sculpteurs de son temps». Mestrovic le lui rend bien, et réalise en 1914 L’Artiste au travail, portrait de Rodin… Il faut dire que le maître français l’inspirait dès 1905, comme l’attestent les personnages expressionnistes de sa Fontaine de la vie, ornant aujourd’hui une place de Zagreb. Quant à Antoine Bourdelle, il n’est pas non plus sans l’influencer dans son évolution vers un monumentalisme héroïque, servant, en particulier, une thématique chrétienne et mystique. L’exemple le plus imposant de cette veine demeure la statue de Grégoire de Nin (1929), exposée dans un parc de Split. Revenu vivre dans son pays natal en 1922, Mestrovic y devient une véritable gloire nationale, en créant des œuvres fortes, mais également en s’intéressant à l’architecture et à l’enseignement. Il se fait aussi connaître à l’étranger, avec des expositions dans le monde entier, notamment à Paris en 1933, et surtout aux États-Unis. C’est d’ailleurs dans ce pays qu’il finira ses jours, y laissant de nombreuses pièces importantes, à l’image des deux Cavaliers indiens en bronze, flanquant depuis 1928 l’entrée du Grant Park à Chicago.

jeudi 15 août 2019 - 14:30 (CEST) -
73, boulevard de La Croisette - 06400 Cannes
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