Attribuée au luthier Duiffopruggar, cette viole jouera sa partition devant la tapisserie de Maximilien Ier.
Après une bonne partie de chasse de haut vol, rien de tel qu’un concert de basse de viole – ou viole de gambe – dans un château réchauffé par une précieuse tenture… Cette vente Haute Époque en donnera un aperçu dès 14 h 30, grâce à la tapisserie des Chasses et voleries impériales de Maximilien Ier, tissée dans les Flandres au début du XVIe siècle (800 0000/1 200 000 €, voir l'article Une tapisserie de haut vol pour Maximilien Ier de la Gazette n° 42, page 14), et à ce luxueux instrument. La vihuela de arco, viole à archet, semble être apparue à la fin du XVe siècle en Espagne, dans le royaume d’Aragon, puis en Italie, avant d’essaimer en l’Europe, où elle est devenue l’instrument de prédilection des nobles et des bourgeois. Sa sonorité douce, proche de la voix humaine, est en effet idéale pour les concertos et les pièces de musique de chambre, qui se multiplient au XVIe siècle. Dans son traité Musica Getutscht publié en 1511, Sebastian Virdung la classe, comme les luths, dans la catégorie des instruments à frettes, considérés comme nobles et joués par les amateurs. Avec sa tête de dragon aux yeux incrustés, ses marqueteries de guirlandes de feuillages et de fruits, et surtout son Moïse inspiré de Michel-Ange et encadré de cuirs découpés, cette viole est exceptionnelle. Une étiquette indique qu’elle a été fabriquée par Gasparo Duiffopruggar. Natif de Fressin (alors ville impériale sous domination germanique), le luthier, installé à Lyon, a été naturalisé par Henri II. «Les instruments de musique charment les oreilles et récréent les esprits davantage lorsqu’ils plaisent aux yeux et qu’ils sont travaillés par la main de maîtres excellents», déclare le roi dans une lettre de 1558. Seules trois violes sont données à Duiffopruggar, l’une conservée au musée des Instruments de musique de Bruxelles, l’autre à La Haye, et celle-ci. Malgré ses restaurations, probablement par Claude Michallon au XVIIe siècle, et Jean-Baptiste Vuillaume au XIXe siècle, elle demeure un témoin du talent de son premier luthier.