Avec Bosschaert le Vieux, la nature morte hollandaise de fleurs acquérait ses premières lettres de noblesse ; ces fleurs coupées en attestent un peu plus encore.
L’Événement Bosschaert de la Gazette du 7 juin l’avait suggéré. Mercredi 19 juin, le bouquet de Fleurs coupées dans un römer posé sur un entablement sur fond de paysage est devenu, à 3 307 800 €, la meilleure enchère de ce premier semestre à Drouot. Le petit panneau du maître flamand du genre, Ambrosius Bosschaert le Vieux (1573-1621), emportait également un record français dans ses effluves parfumés (source Artnet). Il devançait la nature morte aux roses, vendue chez Sotheby’s à Londres le 10 juillet 2002 à 2 907 780 €, peinte également sur un fond de paysage, mais s’encadrant dans une fenêtre ogivale. Or, si le corpus de ces œuvres exécutées devant un paysage est restreint, il l’est davantage lorsqu’elles le sont devant un ciel ouvert, ainsi que Fred G. Meijer, historien d’art spécialiste de la nature morte flamande et hollandaise, le rappelait page 17 de la Gazette préalablement mentionnée. Pourquoi Bosschaert a-t-il choisi ce cadrage audacieux ? Le secret demeure bien gardé, mais il donne ainsi à ses bouquets la présence d’une Madone. Bosschaert le Vieux est un pionnier de la peinture de fleurs. Ces tableaux composés ne parlent pas de réalité les différentes périodes de floraison des espèces représentées en témoignent mais de beauté et de fugacité. Quelle modernité ! Natif d’Anvers, il se réfugiera vite, pour raisons religieuses, à Middelbourg, une petite cité des Provinces-Unies, où il se perfectionne et s’installe comme peintre, mais aussi, à l’instar de nombre de ses confrères, comme marchand d’art. Son parcours est assez bien référencé et l’on sait que c’est à Utrecht entre 1616 et 1619 qu’il réalise ses premiers arrangements floraux dans une niche, puis lors des deux dernières années de sa courte vie, à Breda, qu’il est le plus prolifique, exécutant plus du quart de sa production connue. C’est à cette époque également qu’il introduit un nouvel élément posant sa composition : une rivière serpentant. Il serait certainement allé plus loin encore s’il n’était pas décédé, cueilli dans la fleur de l’âge, en réalisant une dernière commande que son beau-frère Balthasar Van der Ast (1594-1657) achèvera. Mais déjà, son apport à l’art hollandais du Siècle d’or est primordial.