Datée des années 1720, avant donc le voyage en Italie de l’artiste, cette peinture évoque déjà les scènes pastorales qui feront la gloire de François Boucher.
Inédite, cette toile de François Boucher a été rapprochée par les experts de plusieurs de ses œuvres de jeunesse, dont la Pastorale conservée au musée de Montauban ou La Fontaine du musée de Louisville aux États-Unis. Nous sommes ainsi dans les années 1720 lorsqu’il peint cette composition. Dans la fraîcheur de ses coloris à la vénitienne et le dynamisme de la mise en scène, on ressent encore l’influence de son maître François Lemoyne, dans l’atelier duquel il entre à 17 ans. Le jeune peintre s’y inspire également de maîtres anciens, tels le Génois Giovanni Castiglione pour le traitement des troupeaux d’animaux en mouvement, ou encore le graveur néerlandais Abraham Bloemaert pour certains sujets, comme le chien à droite. Par ailleurs, Boucher place sa scène au cœur d’un paysage particulièrement dense et resserré, que Rousseau n’aurait pas renié, autour de ce motif — déjà presque rocaille — de la fontaine qu’il reprendra à plusieurs reprises durant sa carrière. Usée par le temps, elle est envahie par la végétation ; propice aux amours, elle rappelle l’histoire mythologique de l’union éternelle entre le fleuve Alphée et la source Aréthuse. Le thème de la pastorale est en pleine émergence à cette époque, porté notamment par l’œuvre majeur d’Antoine Watteau, décédé en 1721, ou encore par la collaboration, dès 1714, du régent Philippe d’Orléans à une nouvelle édition des Amours pastorales de Daphnis et Chloé de Longus. Au retour de son séjour à Rome, de 1727 à 1731, François Boucher deviendra le peintre emblématique du règne de Louis XV, avec ses coloris désormais brillants et clairs et son dessin sensuel et décoratif, que l’on retrouve aussi bien dans ses scènes pastorales que dans ses portraits ou ses compositions mythologiques rococo. Il a su adapter sa peinture aux évolutions de la société, tournée vers un assouplissement des conventions louis-quatorziennes, jugées trop strictes, et aux demandes de ses commanditaires… pour lesquels l’art est devenu un refuge intime et romantique.