Provenant de la succession de M. C., un ami de l’artiste, ce paysage d’Henri Martin a déjà été présenté au public à l’occasion d’une exposition («Henri Martin 1860-1943. Études et peintures de chevalet») à l’école des beaux-arts de Toulouse, de février à mai 1983. Cette toile, exécutée vers 1926, date de la fin de la carrière de ce peintre d’une grande modestie. À partir de 1900, il voua son œuvre à sa région du Quercy et plus particulièrement à la commune de Labastide-du-Vert, où il acheta une maison secondaire, sur la colline de Marquayrol. Un lieu éloigné de Paris et de ses mondanités, où l’artiste avait pourtant connu un beau succès, placé sous le signe du symbolisme, à la fin du XIXe siècle. Martin nous offre ici un savant, et émouvant, paysage printanier, une saison qu’il appréciait particulièrement, après un hiver souvent passé dans la capitale à peindre de grands décors. Parfaitement construite, la toile verticale se sert du ruisseau comme ligne menant vers le fond de la composition, lequelle s’élève grâce aux emblématiques peupliers de la région, mais aussi vers la colline au-dessus de laquelle trône une bâtisse. Les arbres en fleur, l’eau en mouvement et la lumière omniprésente animent un paysage empli de vie tel que l’artiste aimait les peindre chaque jour, sur le motif, lors de ses excursions. Tout comme son alter ego breton, Henry Moret, l’a fait pour l’impressionnisme, il a eu le mérite d’adapter un style à la mode le pointillisme à sa propre manière, en créant des paysages dans lesquels la couleur et la lumière sont les maîtres mots. À l’image de Camille Pissarro, qui abandonna la technique créée par Seurat pour une plus grande créativité, l’artiste assouplit peu à peu sa manière et sa touche à partir de 1900, espérant, d’une part, reconquérir un plus large public et, d’autre part, retrouver davantage de rapidité et de liberté dans son art. La nature et ses multiples variations s’offrent ainsi plus librement à l’artiste, dont tout le travail est régi par la volonté de transmettre les émotions ressenties devant ce qu’il voit. Un message qui est parfaitement passé, à en juger par les dernières enchères en faveur d’Henri Martin !