Dans la famille Monet, le musée du Luxembourg a choisi Léon, le frère du peintre, chimiste en couleurs et collectionneur d’art. Très tôt, il soutient les impressionnistes, mais aussi les artistes rouennais et tout particulièrement son jeune frère. Il dévoile deux de ses toiles en 1872, lors de la 23e Exposition municipale de Rouen. En 1875, l’Hôtel Drouot organise à l’instigation d’Auguste Renoir une vente très critiquée de tableaux d’impressionnistes, où Léon acquiert cinq œuvres et se positionne ainsi, en nombre d’achats, juste derrière le marchand Paul Durand-Ruel. L’exposition dévoile une large partie de sa collection, dont des tableaux peu montrés de Renoir, Alfred Sisley, Berthe Morisot, Camille Pissarro, ainsi qu’un Charles Frechon, Fenaison, Rouen depuis la rive gauche (1891-1895), qui attire tous les regards. Aérée, la présentation s’articule autour d’un portrait, celui de Léon par Claude, qui le dévoile en homme d’affaires un brin hautain. Boudé par l’intéressé, ce tableau a une valeur symbolique : il fut réalisé en 1874, un moment décisif dans la carrière des frères. Cette année-là, l’aîné commercialise avec succès de nouvelles couleurs à l’aniline et fonde la Société industrielle de Rouen, où il s’installe. De son côté, le cadet fait scandale avec la célèbre toile Impression, soleil levant, peinte deux ans plus tôt, emblématique de l’impressionnisme et du musée Marmottan Monet, dont proviennent une dizaine des œuvres présentées. Le parcours est ainsi jalonné de peintures de Claude, mais aussi de recettes de couleurs, d’échantillons de tissus, et de livres de comptes propres à l’univers de Léon. En faisant dialoguer tous ces éléments, l’exposition montre que la couleur était au centre de leurs préoccupations et se clôt sur un feu d’artifice : des toiles du maître flirtant avec l’abstraction, dont Vue générale de Rouen, de 1892.