Les muscles tendus, les veines saillantes et le poing serré, Lisa Lyon fait fusionner dans cette grande photographie haute de 1 m , les concepts même de féminité et de masculinité. C’est précisément ce que Robert Mapplethorpe a voulu sublimer dans les nombreux clichés qu’il a pris de la bodybuildeuse. Le plus souvent nue dans des postures valorisant sa beauté sculpturale, on la trouve également voilée comme la Vierge de l’Annonciation d’Antonello de Messine, enveloppée dans un large manteau jouant sur les volumes, cintrée dans une veste en tweed et coiffée d’un chapeau pour homme, drapée dans une robe de soirée sous une large capeline, déguisée en mariée ou vêtue comme une danseuse aux côtés d’un éléphant. Autant de variantes de l’identité féminine. Cependant, parmi la multitude de tirages illustrant la muse, proposés aux enchères ces dix dernières années, cette composition-ci n’est apparue, selon les données d’Artnet, pas plus de trois fois l’un d’eux présentant un cadrage plus large. C’est en 1980 que Lisa Lyon rencontre Mapplethorpe, quelques mois après avoir remporté le tout premier championnat du monde professionnel féminin de bodybuilding. Dès l’obtention de son titre, la Californienne se retire du circuit et se consacre à la promotion de la discipline, atteignant une telle popularité que Playboy consacre, à travers elle, son premier reportage sur une bodybuildeuse. Mapplethorpe trouve en elle son modèle idéal. Leur fructueuse collaboration sera même immortalisée dans un ouvrage paru en 1983 aux éditions Viking Press : Lady : Lisa Lyon, dont ce cliché orne la couverture.