Jean Dufy avait la passion de la musique. Son père Léon Marius, comptable dans une entreprise de métallurgie, était un musicien amateur mais enthousiaste. Organiste, il dirigeait les maîtrises des églises de Notre-Dame et Saint-Joseph, au Havre. Il sensibilisa ses onze enfants à son art. Raoul accompagna parfois la chorale à l’orgue tandis que, plus doués, Léon devint professeur de piano et Gaston, compositeur et joueur de flûte traversière. Les peintres de la famille, Jean et Raoul, firent de la musique l’un de leurs thèmes préférés. Ils fréquentaient tous deux à Paris les plus grands musiciens. Raoul assistait ainsi aux concerts et répétitions de l’orchestre du Conservatoire de Paris, dont Charles Münch était le chef. Il appréciait particulièrement Bach, Mozart et Debussy, auxquels il rendit hommage dans ses peintures dès 1902. Pendant l’entre-deux-guerres, Paris fait la fête. Jean, qui s’y est installé en 1912, découvre les joies des nuits parisiennes aux côtés de ses amis Derain, Braque, Picasso ou Apollinaire. Après la guerre, en 1920, il s’installe à Montmartre. C’est une période d’ébullition pour tous les arts. Jean Dufy expose régulièrement dans les Salons et assiste à des spectacles de plus en plus nombreux. Le ballet Le Bœuf sur le toit, créé par Darius Milhaud, après son retour du Brésil, permet au peintre de découvrir de nombreux musiciens de l’époque. Le jazz investit également les salles de concert grâce notamment au succès de la Revue nègre, menée notamment par Joséphine Baker, mais aussi aux nombreux orchestres venus de la Nouvelle-Orléans qui jouent dans les cabarets parisiens. Jean Dufy n’échappe pas à cette mode, comme en témoigne cette toile de 1929 représentant une femme dansant au rythme des saxophonistes, pianiste, percussionniste et autre joueur de banjo. Une peinture dans laquelle est laissé libre cours à une palette très vive, plus proche de ses années fauves que de la seconde partie de sa carrière, et à un dessin brut en adéquation avec cette musique authentique.