Oiseau de bon augure, la cigogne devrait porter chance au sculpteur, grâce à ce groupe fondu par Hébrard.
Ce bronze sera l’œuvre phare d’une dispersion consacrée aux arts décoratifs du XXe siècle. L’amour de Rembrandt Bugatti pour les animaux est perceptible dans ces cigognes, qu’il a dû observer avec un profond respect, pour ne pas troubler la sérénité de leur repos. Il a pu les étudier en Alsace, ayant souvent séjourné chez son frère, à Graffenstaden, ou encore au jardin zoologique d’Anvers – une photographie le montre en train de nourrir l’échassier. Il s’y est rendu en 1907, invité par la Société royale de zoologie de la ville flamande, qui offrait chaque année aux jeunes sculpteurs toute latitude de travailler dans ce qui était alors le plus grand zoo d’Europe. Au printemps de cette même année, il présente ses nouvelles créations à la galerie Adrien-Aurélien Hébrard, à Paris, où son père Carlo expose également ses œuvres d’argenterie. Ce bronze, une pièce unique à la patine brun sombre richement nuancée, qui a fait la réputation du fondeur dont il porte le cachet, y est montré. L’artiste et le fondeur sont en contrat depuis 1904. Ce dernier, collectionnant les sculptures contemporaines, a reconnu dans ces sujets animaliers «le frisson de vie qui agite les œuvres sincères». Naturalistes sans que leur anatomie soit précisément détaillée, ces oiseaux s’animent grâce à la spontanéité qui a présidé à leur création, perceptible par endroits à travers un modelage au pouce qui accroche la lumière.