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Un ébéniste mystérieux

Publié le , par Claire Papon et Anne Foster
Vente le 21 juin 2019 - 13:30 (CEST) - Salle 1-7 - Hôtel Drouot - 75009

Ainsi baptisé par Alexandre Pradère, le «Maître aux pagodes» a été actif sous la Régence. Des noms ont été cités pour l’identifier, sans convaincre. Cette commode fait partie du corpus de meubles qui lui sont attribués. Rareté.

Époque Régence, attribuée au Maître aux pagodes (actif à Paris vers 1730-1745). Commode... Un ébéniste mystérieux
Époque Régence, attribuée au Maître aux pagodes (actif à Paris vers 1730-1745). Commode marquetée en bois de violette de losanges en quartefeuilles délimités par des croisillons de travers, de la même essence, ornementation de bronze doré, plateau de marbre brèche d’Alep, 82 140 63 cm.
Estimation : 40 000/60 000 

Sans estampille ou document spécifiant la commande de mobilier, il est fort difficile d’attribuer avec certitude un meuble à son créateur, en particulier une réalisation de la fin du règne de Louis XIV, sous la Régence, et des premières années du règne effectif de Louis XV. Quelques ébénistes ont développé un style si particulier qu’il fait office de signature. Cela peut être par exemple un type favori de marqueterie, ou encore d’ornements, de la qualité de la garniture en bronze ciselé et doré… comme c’est le cas pour cette commode «à la Régence». Moins massive que celle dite tombeau, elle annonce déjà, avec ses deux rangs de tiroirs, le style Louis XV, étant cependant moins galbée en façade et sur les côtés. Ce meuble, remarquable par sa composition équilibrée, sa marqueterie en bois de violette, présente en outre un décor original en bronze ciselé et doré. Relativement proche de certaines réalisations d’Étienne Doirat, d’un des fils Boulle, André-Charles II dit Boulle de Sève (Sèvres), ou de Charles Cressent, plusieurs éléments de son ornementation de bronze se retrouvent sur d’autres créations inscrites par Alexandre Pradère dans le corpus d’un ébéniste parisien actif au début du règne de Louis XV, précisément vers 1730-1745, qu’il nomme «le Maître aux pagodes» en référence à son attrait pour les chinoiseries. Cette attribution prend en compte les bronzes, notamment les poignées de tirage en arbalète à décor de cartouches feuillagés, coquilles et crosses stylisées, que l’on retrouve à l’identique sur une commode conservée au château de Wilhelmsthal, à Cassel. Dans son ouvrage Les Ébénistes français de Louis XIV à la Révolution (Tours, 1989), Alexandre Pradère indique qu’il était fournisseur de la cour de Saxe. Illustrant son article consacré au Maître aux pagodes, en 1992 dans L’Estampille/L’Objet d’art, une gaine conservée au palais de la Résidence, à Munich, présente un masque de triton sur les chutes et des pieds antérieurs se terminant en dauphin, des ornementations communes à cette commode. Autant de signatures de cet ébéniste mystérieux, mais très recherché des collectionneurs.