Giovanni da Bologna Lot n° 2015

Giovanni da Bologna Crucifixion avec Marie, Jean et les anges en deuil Tempera et or sur bois. 165,4 x 77,2 cm. Provenance Baron Detlev von Hadeln, Florence. - Wildenstein, Paris, 1955 - Collection Heinz Kisters, Kreuzlingen. - Vente aux enchères de Christie's, New York, 29.1.2014, lot 108. Littérature C. Guarnieri : Per un corpus della pittura veneziana del Trecento al Tempo di Lorenzo, in : Sagge e memorie di storia dell'arte, XXX (2008), p. 33. Cette Crucifixion représente la seule œuvre détenue en propriété privée de Giovanni da Bologna, un artiste actif à Venise et dans le nord de l'Italie - à Padoue, Bologne et Trévise - dans la seconde moitié du XIVe siècle. L'importance de son art s'explique - outre la grande qualité de sa peinture - par le rôle de médiateur qu'il a joué entre ces centres artistiques. Son art trouve son origine dans la peinture de Lorenzo Veneziano, le principal artiste de Venise dans la seconde moitié du XIVe siècle. À Padoue et à Bologne, il entre en contact avec les tendances d'une nouvelle peinture, qu'il apporte à Venise. Cette nouvelle peinture de la terre ferme s'inspire de l'art de Giotto du début du siècle et se caractérise par un nouveau réalisme ainsi que par une nouvelle intensité dans la représentation des émotions. Selon Guarnieri, "Giovanni da Bologna (...) est considéré comme le principal représentant d'un lien entre l'art bolonais et vénitien et, par conséquent, un important médiateur de l'art moderne. qui, à partir de la terraferma, a lentement remplacé le gothico-byzantin fatigué et répétitif.L'école vénitienne byzantine ("... considerato ora il più felice rappresentante della fusione dei caratteri bolognesi con quelli veneziani e perciò tramite importante dell'arte moderna che dalla terraferma lentamente penetrava e rivitallizzava la stanca e ripetitiva scuola gotico-bizzantineggiante veneziana..." ; Guarnieri, op. cit, S. 32). Cette Crucifixion, qui a figuré dans plusieurs collections privées importantes, est un exemple remarquable de ce nouvel art de Giovanni da Bologna dans la seconde moitié du Trecento. Une série de documents et d'œuvres signées forment le cadre de la reconstitution de l'œuvre de Giovanni da Bologna. À Trévise, qui faisait alors partie de la terraferma vénitienne, il est mentionné dans des documents en 1377 et 1378 comme "magister Iohannes de Salamone impictor quondam ser Albertini de Regio". En 1385, il est enregistré à Venise, et en 1389, il rédige son testament. En plus de Venise et Trévise, il est également actif à Padoue et Bologne. Quatre œuvres signées de sa main ont survécu et se trouvent aujourd'hui dans d'importants musées : Une Madonna dell'umiltà à la Pinacoteca di Brera, Milan (fig. 1) ; une autre Madonna dell'umiltà à la Gallerie dell'Accademia, Venise ; un Couronnement de Marie au Denver Art Museum, Denver/Colorado (fig. 2) ; et un Saint Christophe au Civici Musei agli Eremitani, Padoue. D'autres œuvres se trouvent à la Pinacoteca Nazionale de Bologne et au Museo Thyssen-Bornemisza de Madrid. Cette Crucifixion impressionne par la conception clairement statuaire, presque monumentale, des personnages, en particulier Marie et Saint Jean, qui se tiennent en deuil sous la croix et regardent vers le crucifié. Ces deux figures révèlent très clairement à quel point Giovanni da Bologna s'est éloigné de la manière "gothico-byzantinisante" de Venise et invite le spectateur à compassio, à sympathiser, à travers un dessin clair. Aussi claire que soit la composition des figures, aussi sublime est la coloration, une triade de bleu, rouge et or lumineux, qui détermine la représentation de la Crucifixion. Le fait que le lapis-lazuli ait été utilisé pour le bleu montre que cette Crucifixion était une commande importante. Detlev von Hadeln - chercheur, connaisseur, collectionneur Detlev von Hadeln (Fig. 3) a eu la chance rare d'être à la fois un chercheur et un collectionneur - de rechercher ce qu'il collectionnait et de collectionner ce qu'il recherchait. Cette crucifixion de Giovanni da Bologna faisait partie de sa collection. Issu d'une famille de barons de Hesse, il a étudié l'histoire de l'art à Iéna et y a obtenu son doctorat. Après des stations à Dresde et Berlin, il s'est installé à Florence. L'art vénitien, en particulier la peinture et le dessin, est devenu le thème de sa vie alors qu'il était encore étudiant à Iéna. "Dessins vénitiens de la Haute Renaissance", "Premières œuvres du Tintoret", "Dessins du Titien" ou "Dessins à la main de G. B. Tiepolo" sont les titres de certaines de ses publications. Il a également édité la plus importante publication historico artistique du Cinquecento vénitien, Meraviglie dell'arte de Carlo Ridolfi. Sa collection d'art a été acquise en 1947, un peu plus de dix ans après sa mort prématurée,