FERNAND WÉRY (1886 - 1964) Lot n° 40

Le paysan Huile sur toile Olie op doek 38 x 36 cm Encore un tableau qui, sans être intimiste, est paisible et doux, presque tendre; il est lumineux malgré ses gris, ses bruns terreux, saturé de cette lueur qui semble percer à travers le gris-bleu du ciel; il est surtout d'une extrême simplicité: couleurs posées presque en à-plat, composition ramenée à 3 bandes horizontales: le buste, le champ, le ciel; la ligne d'horizon flotte vaguement, grenue, large, posée lentement, sans appuyer, avec un léger tremblé; la ligne des épaules du paysan lui répond; si le paysage est presque un rêve, le visage est détaillé: malgré les yeux quasiment clos, le regard est expressif (portrait psychologique d'un type: le paysan posé, taciturne, mais qui n'en pense pas moins); on est loin de la préciosité raffinée d'un Van de Woestijne, ou du maniérisme bourru d'un Permeke... Au lieu de couleurs discrètes, on pourrait parler de couleurs minimalistes; en effet, pour moi, le minimalisme ne consiste pas à éliminer les couleurs (en se cantonnant soit au blanc: Manzoni, certains Leblanc, soit au noir: Soulages) mais à les abaisser dans la mesure du possible, à les neutraliser, comme je l'ai noté à propos de Le Roux; la palette de cette oeuvre-ci est typiquement celle des cubistes. Le minimalisme, c'est tout simplement plus avec moins; on dit toujours qu'en art, il n'y a pas de progrès; mais la tendance au minimalisme en est un, et j'en vois au moins 3 autres, naturellement liés: la perte d'importance du sujet, de la narration (au profit des rapports); la perte d'importance de toute espèce de concepts (au profit de la sensation, serrée toujours plus près, à la recherche d'une forme “d'innocence” peut-être); l'évolution vers la forme pure (tout art aspire à la condition de la musique). Le problème du minimalisme, c'est qu'il n'y a pas d'oeuvres plus ou moins bonnes: c'est tout ou rien; le peu est un jeu dangereux: beaucoup de déchets, peu de miracles.