Constantin Brancusi, sculpteur d’images
Pas moins de onze photographies de Constantin Brancusi composent le lever de rideau de cette dispersion. Un ensemble d’une seule provenance qui rappelle l’importance et le rôle qu’il donnait à ce médium.

Estimation : 8 000/12 000 €
Beaucoup de clichés de Constantin Brancusi existent, peu toutefois apparaissent sur le marché. Si celui-ci s’est un peu développé au cours de ces cinq dernières années comme l’explique Antoine Romand, l’expert de la vente, c’est à Beaubourg qu’il faut se rendre pour y voir l’atelier du sculpteur reconstitué et le fonds le plus important de ses photographies ainsi que des films qu’il réalisa. Nos épreuves, d’époque et annotées à la main, ont été réalisées entre 1908 et 1925. Neuf d’entre elles représentent des œuvres, en bois ou en pierre – dont La Sorcière, Mlle Pogany, La Muse endormie et La Sagesse –, les deux autres sont des autoportraits de Brancusi lui-même, le cheveu un peu fou, son chien Polaire à ses côtés. Les estimations (2 000 à 12 000 €) devraient être dépassées, le marché très pointu attirant une clientèle internationale. Ces photos sont le fruit et le témoin de la collaboration de l’artiste roumain avec Ethel Moorhead, peintre britannique qui édite à Paris, en mai 1925, le premier numéro de la revue This Quarter, consacrée à la scène artistique et littéraire. Plusieurs sculptures du maître y sont reproduites. Nos épreuves ont servi à l’élaboration de la publication comme le montrent certaines annotations ou indications de recadrage laissées par le sculpteur. Ce dernier voit dans la photo le moyen de diffuser son œuvre, de montrer son univers dans de savantes mises en scène, de mettre sur un pied d’égalité ombre et lumière, image et matière, de transformer ses sculptures… D’abord pensées comme un outil de catalogue, ses photographies deviendront des œuvres d’art à part entière, Brancusi ne confiant à personne d’autre que lui, pas même à son ami Edward Steichen, le soin de les capturer. Dans les années 1920, il passera de l’utile à la passion grâce à Man Ray, qui lui enseignera l’ensemble du processus, de la prise de vue à l’impression. «Pourquoi écrire sur mes sculptures ? Pourquoi ne pas tout simplement montrer leurs photos ?», questionnait celui qui a légué 1800 prises de vue à la postérité.