Par l’entourage de Joachim Patinir
Saint Jean-Baptiste nous annonce la venue du Messie dans ce tableau, prétexte au déploiement d’un fantastique paysage dans lequel virevolte l’œil du spectateur.

Estimation : 60 000/80 000 €
Réalisée vers 1550, cette peinture provenant d’une collection particulière est donnée à l’entourage de Joachim Patinir. Un nom qui évoque à tous les spécialistes l’éclosion du genre du paysage au début
du XVIe siècle. Installé à Anvers, le peintre y reçut notamment la visite d’Albrecht Dürer, qui devint son ami ; le génie de Nuremberg réalisa deux portraits de celui qu’il qualifiait de Gut Landschaftmaster (« bon maître paysagiste »). Pour l’expert Stéphane Pinta, « Patinir a poussé le souci du détail, la qualité d’exécution et le rendu des matières à un tel degré qu’il a finalement été assez peu imité ou même égalé ».
Les auteurs les plus probables de cette composition pourraient ainsi être ses élèves, Lucas Gassel ou Herri Met de Bles, mais sans certitude. On retrouve dans cette Prédication de saint Jean-Baptiste plusieurs éléments typiques des paysages de Patinir ; tout d’abord, la composition en hauteur qui permet d'en voir l'ensemble à vol d’oiseau ; la scène religieuse, souvent tirée chez lui de la Légende dorée de Jacques de Voragine, n’est également qu’un prétexte à se promener dans la nature, un thème au cœur de cette Renaissance durant laquelle on se passionne pour la découverte de terres lointaines et encore mystérieuses. Ainsi la scène du premier plan, avec le personnage de saint Jean-Baptiste vu de dos prêchant devant une foule, se fragmente-t-elle au fur et à mesure que l’on chemine dans le paysage, le regard du spectateur étant tantôt arrêté par les deux impressionnants rochers en forme de coquillage – un aspect minéral très présent chez Patinir –, tantôt happé par les différents chemins menant à des scènes narratives illustrant différents moments de la vie du saint. Devant la porte de la cité, on assiste à la décapitation de Jean-Baptiste, tandis que dans la partie droite, ce sont ses ossements que l’on brûle, un acte à l’origine de nos fêtes de la Saint-Jean. Enfin, au fond, dans le fleuve, a lieu le baptême de Jésus, alors que la colombe venue des cieux descend sur la tête du Christ… D’une minutie exceptionnelle, l'ensemble demeure malgré tout imaginaire, comme en témoigne l’étonnante tour ronde, rappelant celle de Babylone, au-dessus de laquelle semble voler une curieuse sphère noire. Un paysage finalement situé entre un monde féerique médiéval à la Jérôme Bosch et l’univers humaniste de la Renaissance.