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Lot n° 31

NICOLAS MIGNARD TROYES, 1606 - 1668, PARIS

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Portrait de Pierre-François Tonduti, seigneur de Saint-Léger (1583 - 1669) Huile sur toile Vers 1658 42 x 34,2 cm PROVENANCE Vente Sotheby's, 16 juin 2016, lot 13 comme «Entourage de Philippe de Champaigne». Dans ce portrait, récemment apparu sur le marché de l’art parisien et jusqu’à au - jourd’hui non identifié, la main du peintre Nicolas Mignard d’Avignon est bien reconnais - sable. La lettre d’une gravure (Fig. 1) confirme cette paternité. Elle nous révèle aussi l’identité du personnage représenté : Pierre-François Tonduti de Saint-Léger. Tonduti de Saint-Léger (1583 - 1669) Les traits du modèle de notre tableau sont en effet reproduits, avec une grande fidélité, dans un portrait gravé qui figure en tête d’un traité juridique publié à Lyon en 1659 1 . Le nom de l’auteur de l’ouvrage est indiqué avec précision (Petrus Franciscus Tondutus Sanlegerius IC Avenionensis 2 ) avec la date (Anno Domini M.DC. LIX) et le nom du créateur du portrait (N. Mignard delin.). Cette gravure était due à François de Poilly, qui était établi à Paris après avoir passé plusieurs années à Rome (il y avait gravé, au début des années 1650, les fameuses « Mignardes », trois Vierges à l’Enfant peintes par Pierre Mignard le Romain, frère de Nicolas). Des vers de l’excellent poète néo-latin Jean de Saint -Geniès achèvent d’ennoblir cette représentation. Ce portrait gravé par Poilly allait se retrouver un peu plus tard au frontispice d’un autre savant traité de Tonduti 3. Mais l’éminent jurisconsulte brillait aussi dans d’autres domaines. Il était en effet féru de mathématiques et d’astronomie, marchant du même pas que le Jésuite Athanase Kircher: celui-ci, professeur au collège d’Avignon de 1632 à 1634, y avait aménagé dans une tour un observatoire avant de partir pour Rome et d’y poursuivre au Collegio Romano les herculéens travaux d’érudition qui le rendirent célèbre. Dès 1628, Tonduti avait été consulté par le grand Peiresc (Fig. 2) -figure centrale, incontournable, de la République savante européenne !- à propos des récentes publications astronomiques de Képler et de Tycho Brahé. Le philosophe et théologien Gassendi (Fig. 3) ne manqua pas de noter cette collaboration dans la « Vie » qu’il consacra à Peiresc : « Il pressa l’enquête auprès d’hommes éminents : Pierre-François Tonduti Saint-Léger, jurisconsulte avignonnais, et Jacques de Valois, l’Écossais, trésorier général du Dauphiné, l’un et l’autre spécialiste de toute mathématique et spécialement d’astronomie. Il reçut en outre de l’un et de l’autre de quoi réparer diverses erreurs » 4 . C’est avec Gassendi lui-même que le juriste avignonnais s’occupa, à l’occasion d’une éclipse solaire, d’étudier des questions de longitude et de latitude concernant les villes d’Avignon et de Digne 5. Placé au centre d’un réseau de correspondants allant de Rome (le P. Kircher) à Paris (le mathématicien Jean-Baptiste Morin), proche de Peiresc et de Gassendi, Tonduti est une belle figure de la communauté des humanistes et des hommes de science attachés à cultiver sous toutes ses formes l’Ars magna sciendi. 6  Tonduti et Nicolas Mignard La formule N. Mignard delin. 7 que l’on trouve dans son portrait gravé montre que François de Poilly a travaillé à Paris non pas directement d’après le portrait peint par Nicolas Mignard -ce tableau est certainement resté en Avignon chez Tonduti, ne serait-ce que pour éviter un transport au coût prohibitif !- mais d’après un dessin de l’artiste envoyé, pour plus de commodité, dans la capitale. Notre tableau est la « teste » peinte directement devant la personne représentée, à partir de laquelle l’artiste pouvait achever « à loisir » un portrait complet. 8 Le peintre et son modèle étaient liés. Nicolas Mignard nous l’apprend lui-même dans une lettre du 16 décembre 1661, adressée à un correspondant avignonnais 9. Appelé par le roi à l’automne 1660, il avait quitté Avignon pour Paris et avait vite obtenu dans la capitale le plus grand succès, peignant notamment des portraits du roi, de la famille royale et de la haute aristocratie : « Je crois que je ferai encore le portrait de Sa Majesté à la fin de l’été pour le plus tôt, quoique celui que j’ai fait soit le plus ressemblant que j’aie peint de ma vie. Vous en verrez une copie dans peu de jours que j’envoie à Monsieur de St-Légier à qui j’ai de grandes obligations. Mon original a couru partout, savoir à quatre graveurs Messieurs Nanteuil, Vanscupin [Van Schuppen] et les deux Poully [Poilly]. (Voir suite dans le catalogue)

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