FLAUBERT (Gustave). Lettre autographe, adressée à [Louise Colet]. [Rouen, janvier 1847]. 4 pages in-4°.
Belle lettre d'amour du romancier à sa maîtresse la poétesse Louise Colet (1810-1876). Elle témoigne de leur attachement mutuel, du soin que Flaubert prend à rassurer son amie, tout en lui faisant part de pensées intimes. Plusieurs formules, des sous-entendus, laissent pourtant paraître une certaine ambigüité de sentiments qui donnent à cette lettre une remarquable ampleur.
Il répond à sa correspondante, et dès les premières lignes, le ton est donné : « Ta lettre de ce matin [...] aurait amolli des tigres et je ne suis pas un tigre, va ! Je suis un pauvre homme bien simple et bien facile et bien homme, « tout ondoyant et divers », cousu de pièces et de morceaux, plein de contradictoires et d'absurdités. Si tu ne comprends rien à moi je n'y comprends pas beaucoup plus moi-même. Tout cela est trop long à expliquer et trop ennuyeux. Mais revenons à nous : puisque tu m'aimes je t'aime toujours. J'aime ton bon coeur si ardent et si vif [...] ».
[...] Eh, moi aussi je t'aime, lis-le donc ce mot dont tu es avide et que je répète p[ou]rtant à chaque ligne. [Et, plus loin] : « Ton souvenir me met en mollesse, tes lettres me remuent et je les ouvre en palpitant [...]. [...] Mais peut-être as-tu raison, je suis froid, vieux, blasé, plein de caprices et de niaiseries et égoïste aussi peut-être ! Qui ne l'est pas ? [...]. Moi je suis comme le macaroni au fromage qui file et qui pue ; il faut en avoir l'habitude p[ou]r en avoir le goût. On s'y fait à la longue, après que bien des fois le coeur vous est venu aux lèvres [...]. »
Plus loin, Il la remercie de lui avoir envoyé un livre de Volney, enveloppé dans un joli foulard qu'il promet de porter. Et termine sur un post-scriptum, où il est question de Maxime Du Camp, soucieux de la tristesse que semble éprouver Louise Colet.
(G. Flaubert, Correspondance, Bibl. de la Pléiade, t.1, p.426