L’estimation était quintuplée pour ce manuscrit de Mozart, emporté à 546 000 €. Le compositeur a tracé douze portées au recto de cette feuille, qui arbore un filigrane répertorié par le musicologue britannique Alan Tyson, permettant de déterminer que ce document a été réalisé sur le même papier que le final de la Symphonie n° 41 achevée en août 1788, et dite «Jupiter». Apparue une trentaine d’années plus tard, cette appellation viendrait du violoniste, chef d’orchestre et organisateur de concerts allemand Johan Peter Salimon. La thématique de la fugue en ut inscrite ici, à quatre parties occupant vingt-huit mesures, est à rapprocher de cette symphonie, la dernière de toutes. Entre juin et août, le musicien de 32 ans, triomphant à Prague avec Don Giovanni et pourtant en grande difficulté financière, en composa trois au terme d’un travail effréné. Sur cette page, il a en outre esquissé de manière condensée la première pensée des thèmes de deux canons, à quatre et trois voix. Ils font partie d’un ensemble de dix canons qu’il a enregistrés dans son catalogue thématique en 1788, moins d’un mois après la fameuse symphonie. Ils étaient destinés aux intimes de Mozart, car accompagnés de paroles fort lestes, voire scatologiques, également écrites par lui, dans un mélange de latin de cuisine, d’italien, de français, d’anglais et de dialecte viennois. Elles ont été édulcorées à la demande de Constance Mozart lors de leur publication, en 1804, chez Breitkopf & Härtel. Un feuillet provenant de la Sérénade n° 3 en ré majeur dite «Antretter» K.185, composée à Vienne en 1773, et dont le manuscrit a été démembré après sa vente, en 1975, obtenait quant à lui 123 500 €. Olivier Messiaen était l’autre compositeur en vue de la journée, grâce au manuscrit de son Catalogue d’oiseaux pour piano, emporté pour 130 000 € (voir l'article Olivier Messiaen, compositeur ornithologue de la Gazette n° 24, page 147).