À la manière d’un Claude Monet peignant durant deux années, de 1892 à 1894, la cathédrale de Rouen, Robert Pinchon a également pratiqué la série. En témoigne cette toile, qui appartient à un ensemble de peintures réalisées en 1908 sur le thème du pont Corneille. Construit en pierre entre 1813 et 1829, il s’agit de l’un des monuments emblématiques de la ville normande, baptisé en 1848 du nom du dramaturge du XVIIe siècle. Natif de Rouen, Corneille est l’une des gloires de la cité, et Robert Pinchon le sait mieux que quiconque puisqu’il a effectué ses études secondaires au lycée qui porte son nom. L’artiste est âgé de 22 ans quand il peint cette vue dynamique des quais de Seine et du pont. Il utilise ici une composition chère aux maîtres impressionnistes, à l’image des vues animées de Paris de Camille Pissarro, dans lesquelles une multitude de personnages donnent vie au paysage urbain. Né dans un milieu artistique et littéraire son père était journaliste et critique dramatique, ami de Guy de Maupassant , Pinchon s’intéresse donc très tôt à la peinture. Il montre son travail pour la première fois, à 14 ans, chez les marchands de couleurs fines Dejonghe et Dumont. La critique est déjà séduite. Pinchon se perfectionnera par la suite auprès de Philippe Zacharie, à l’école des beaux-arts. Sa première exposition personnelle a lieu en 1905, à la galerie Legrip. C’est encore une fois une réussite, qui le conduira à intégrer la Société des artistes normands. Le collectionneur François Depeaux s’intéresse aussi à lui, lui achète plusieurs toiles et le met en contact avec une galerie parisienne. Un succès mérité pour ce talentueux coloriste et peintre de plein air.