En pleine période de la Régence, le Français Bernard Picart (1673-1733), réfugié aux Pays-Bas depuis 1709 pour cause de protestantisme, décide en commun avec l’éditeur Jean-Frédéric Bernard (1680-1752) un compatriote également, dont la famille était partie dès la révocation de l’Édit de Nantes de répertorier dans une somme les Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde. Ce travail gigantesque aboutira à la publication, à Amsterdam, à partir de 1723, de onze volumes in-folio riches de 265 planches. Un exemplaire de la série du premier tirage, d’une grande fraîcheur, se parcourait à 17 977 €. L’ouvrage comprend l’histoire philosophique de la religion de toutes les nations alors connues sur les deux hémisphères. Et, bien que les auteurs l’éditeur était également écrivain n’aient pu évidemment assister à toutes les cérémonies dépeintes, n’ayant jamais voyagé hors d’Europe, ils en livrent des descriptions très précises, corroborées par les récits de voyage, dont la production ne cessait d’augmenter. Elles contribueront à changer la vision de leurs contemporains et placeront ce livre en position de précurseur dans ce XVIIIe siècle qui verra le triomphe des Lumières. De fait, c’est la première fois que les différentes religions du monde sont mises sur un pied d’égalité. Les nombreuses gravures feront sa réputation, mais les textes, essentiels, ne doivent pas être négligés. L’ouvrage sera bien sûr mis à l’index dans le bien-pensant royaume de France, ce qui ne l’empêchera pas de connaître un succès réel et durable, ainsi que plusieurs rééditions et traductions jusqu’en 1841.