Henry Moret est l’un des grands habitués des ventes brestoises de tableaux modernes. Ce chantre de la Bretagne, grand fidèle de l’école de Pont-Aven, sera une nouvelle fois présent avec deux paysages empreints de spontanéité et de dynamisme : Gros temps à Doëlan une vue horizontale de bord de mer décrivant trois personnages sur les falaises, au milieu d’herbes chatoyantes, battues par le vent et face à une mer déchaînée (100 000/150 000 €) et cette toile de 1900, Vallons au printemps, passée anciennement par la collection Durand-Ruel. La composition en hauteur rompt avec les panoramas souvent utilisés par Moret, et n’est pas sans évoquer les estampes japonaises qu’il appréciait tant, les lignes verticales des arbres accompagnant la progression du regard du spectateur vers le haut de ce paysage en contre-plongée. L’œuvre appartient au moment où le peintre est à l’apogée de son art. C’est en 1894 qu’il découvre le petit port de Doëlan, avant de s’y installer définitivement deux ans plus tard, avec sa compagne et future femme Célina Chatenet une couturière qui tenait son propre atelier à Lorient et lui fournissait ses toiles et châssis, rencontrée l’année précédente. L’artiste commence à exposer au Salon de 1880, à une époque où les impressionnistes révolutionnent la peinture. Bien qu’il fréquente très tôt Pont-Aven, y louant dès 1886 un atelier chez le maître du port, l’influence du synthétisme de Paul Gauguin et d’Émile Bernard ne se fera sentir que quelques années, de 1889 à 1894. Mais cette période est marquée par d’importantes difficultés financières, le public étant peu sensible à sa peinture d’avant-garde. La touche hachurée, de plus en plus large avec les années, reprendra alors ses droits, dans des paysages qui possèderont toujours une atmosphère bien particulière, au symbolisme latent, aux cadrages audacieux et aux couleurs suggestives, chaudes et froides, d’une grande force tels les rose, mauve et vert s’associant avec émotion dans nombre de ses toiles. Une direction vers laquelle le pousse aussi le marchand Paul Durand-Ruel, qu’il rencontre en 1895 et qui lui assurera une sécurité financière. Henry Moret mènera ainsi durant les vingt années suivantes une vie heureuse et une carrière dédiée à ses très chers paysages bretons.