En suspens depuis l’Exposition universelle à Hanovre, en 2000, l’histoire du pavillon du Bhoutan connaîtra bientôt son dénouement, lors d’une vente à Mâcon.
Salué par le public et la critique comme l’une des plus belles créations de l’Exposition universelle Millénium de Hanovre, le pavillon du Bhoutan incarne toute la beauté de la culture du pays du «bonheur national brut». Mais il a aussi donné lieu à un imbroglio juridique, qui prouve une fois de plus la complexité des politiques culturelles. L’origine de cette construction de 300 mètres carrés remonte à l’an 2000, et à sa réalisation, sur une année entière, par les meilleurs artisans bhoutanais dirigés par Peter Schmidt architecte suisse qui s’est installé dans ce petit royaume de l’Himalaya. Sa conception respecte les traditions ancestrales. Utilisant le pin bleu local, le pavillon prend, pour sa partie principale, la forme d’un lhakhang «maison des divinités» en tibétain , orné d’un triple toit au sommet duquel se trouve un pinacle traditionnel en cuivre, ou serto. Cette partie centrale est reliée à des galeries latérales couvertes de doubles toits se terminant par des pinacles en cuivre appelés «gyeltsen» («bannières de victoire»). Si l’architecture extérieure est impressionnante, faisant appel à des techniques inconnues en Europe, à la fois rudimentaires et ingénieuses, la décoration intérieure est également d’une grande richesse. Un autel bouddhique central est occupé par cinq statues en argile peinte, accompagnées entre autres de dragons taillés dans une seule pièce de bois. Partout ailleurs, à l’intérieur comme à l’extérieur, peintures et motifs traditionnels égayent ce lieu de prière et d’exposition.
Convoité par Richard Gere
Même si les bâtiments créés pour les Expositions universelles ont généralement une existence éphémère, personne ne put se résoudre à la destruction de ce pavillon. Les autorités bhoutanaises ont alors vu affluer de nombreuses demandes d’acquisition, provenant d’Autriche comme des États-Unis. Parmi les acheteurs intéressés, l’acteur Richard Gere en personne, bouddhiste convaincu. Finalement, c’est l’Europe qui sera choisie comme nouvelle destination, plus particulièrement la France et la région Bourgogne. Ce qui a fait pencher la balance ? La présence, dans la petite commune de La Boulaye, du temple des mille bouddhas, rattaché à la congrégation tibétaine Dashang Kagyu Ling, qui accueille chaque année près de 35 000 visiteurs. Mais cette opération ayant un coût, les choses n’ont pas tardé à se compliquer. En effet, le Conseil général de Saône-et-Loire a déboursé 228 000 € pour l’acquisition du pavillon. À cette somme se sont bien vite ajoutés des frais de stockage pour les 17 000 pièces détachées placées dans dix-sept containers. Le projet s’est révélé trop ambitieux : l’implantation et la reconstruction du bâtiment auraient demandé bien plus d’investissement… La situation s’est donc enlisée durant les dix-huit dernières années, au fil des rebondissements juridiques et des aléas de la vie politique. Offert en 2009 par Arnaud de Montebourg, alors député socialiste de Saône-et-Loire, pour 1 € symbolique, à la commune de Mâcon, le pavillon est aujour-d’hui confié au commissaire-priseur Jérôme Duvillard, dans l’espoir d’offrir une nouvelle vie à ce temple, symbole de la culture ancestrale du Bhoutan. Cet État est certes l’un des plus petits pays du monde mais il semble doté d’un grand pouvoir de persuasion… Il est ainsi à l’initiative de la Journée mondiale du bonheur votée par l’ONU en 2012 , fêtée le 20 mars. À votre tour de vous laisser convaincre !