Avec ses côtés mouvementés toutes faces, ce bureau plat de près de deux mètres en impose. Son délicat placage d’ébène rappelle les grandes heures du règne de Louis XIV, mais la cambrure de ses pieds le rattache à la Régence. Il ouvre par trois tiroirs en ceinture, dont le central en léger retrait, dans une forme désormais traditionnelle depuis l’invention de ce type de modèle, dit «bureau plat» ou «bureau Colbert» — à la fin du XVIIe par l’ami de Lieutaud et ébéniste de Louis XIV, André-Charles Boulle. Ce dernier créa un meuble nouveau, à la fois confortable et somptueux, qui remplaça avantageusement le peu pratique bureau Mazarin à huit pieds et caissons. Les bronzes dorés de celui-ci sont également particulièrement remarquables avec leurs motifs en agrafe, bustes de femme, mascarons et feuilles d’acanthe en chute. Rien d’étonnant lorsque l’on sait que le roi avait offert à Lieutaud le rare privilège de pouvoir fondre dans son atelier de la rue Saint-Nicolas, alors que cette fabrication était réservée à la corporation des bronziers. Ce bureau est à rapprocher de ceux estampillés « FL » conservés à la Residenz Ansbach et au château Nymphenburg de Munich. Rappelons que le travail d’attribution reste difficile puisqu’à l’époque l’obligation d’estampiller n’avait pas cours (elle ne fut imposée qu’en 1743). François Lieutaud ne signait en effet que rarement ses meubles, et uniquement de ses initiales.