Inventés sous Louis XV, les sièges de bureau, fabriqués à l’unité, doivent séduire sous toutes leurs faces, leur propriétaire présentant fréquemment dos ou profil à son visiteur. Ce modèle de Sulpice Brizard en fournit un bel exemple.
Le pari décoratif est réussi avec ce siège au grand dossier sculpté, dont les caractéristiques permettent de le dater de la toute fin du XVIIIe siècle. Comme souvent sous le Consulat, les motifs «retour d’Égypte» y voisinent avec ceux d’inspiration gréco-romaine, les palmettes stylisées avec les pieds griffe surmontés de jarrets d’animal. Plus connu pour ses productions Louis XVI, Sulpice Brizard est l’un des menuisiers les plus originaux de sa génération. Il innove tant dans ses décors, parmi lesquels les pieds en cannelures à spirales, que dans le gabarit de ses sièges. S’inspirait-il de recueils gravés d’architecture, travaillait-il pour des donneurs d’ordres appréciant son esprit créatif ? On sait peu de choses sur cet artisan reçu maître en 1762, installé trois ans plus tard rue de Cléry, dont l’épouse, Marie-Geneviève, était la fille d’Étienne Meunier, célèbre menuisier au milieu du XVIIIe, qui passe pour être l’un des créateurs du fauteuil de bureau. On ignore la date de son décès, et nulle trace de son livre-journal… Ce fauteuil est à rapprocher des productions de Jacob Frères réalisées sous le Consulat, mais s’en distingue par le traitement plus libre et réaliste des protomés de lion. Il rappelle aussi un modèle en bois doré conservé à la Wallace Collection de Londres, dont le dossier plein présente une forme incurvée et une sculpture occupant la totalité du revers. Des atouts qui s’ajoutent à la cote soutenue dont bénéficient depuis longtemps les fauteuils de bureau.