Conservé depuis des générations dans la collection de la famille d’Halluin, non loin de Roubaix, ce brillant panorama de Tobias Verhaecht est propice à une promenade enchantée.
Des villageois dansent, d’autres se disputent, tandis que de l’autre côté de la rivière, où glissent des bateaux à voile, les personnes de haut rang rentrent dans leur château de style Renaissance, du nord de l’Europe. La belle demeure est ceinte d’une muraille et présente un somptueux jardin à l’intrigant labyrinthe. Ce large panorama se termine, en arrière-plan, par un bel horizon s’évaporant des montagnes… Paysage, scène de genre ou marine ? Tobias Verhaecht démontre dans cette peinture se déployant sur 178 cm toute la panoplie de son talent. Il faut dire que le peintre anversois s’est ouvert de nouveaux horizons lors de son voyage en Italie, à Florence et à Rome, dans les années 1580, durant lesquelles il exécutait des fresques, de grandes dimensions déjà. Issu d’une famille de peintres et de marchands, il revient aux Pays-Bas pour rejoindre, en 1590-1597, la guilde de Saint-Luc et devenir peintre officiel de l’archiduc Ernest d’Autriche. Il réalise de nombreux paysages, accueillant bien souvent des scènes religieuses, comme le Paysage aux pèlerins d’Emmaüs du musée Magnin de Dijon ou le Saint Jean l’évangélisateur à Patmos, conservé à l’Ermitage de Saint-Pétersbourg. Il aborde aussi volontiers le sujet de la tour de Babel, qu’il représentera à plusieurs reprises et dont un bel exemple est exposé au musée de Mayence. Bien qu’il demeure dans la belle tradition flamande du paysage, son style, raffiné et décoratif, s’inspire de l’art des maniéristes du Nord, en tête desquels Joachim Patinir ou Joos de Momper, ce dernier privilégiant également les grands panoramas de ce type. Tobias Verhaecht fait montre dans ses dessins d’une verve annonciatrice de l’art baroque. Sa célébrité fera de lui un professeur très recherché : il comptera d’ailleurs parmi ses élèves un certain Pierre Paul Rubens.