En ordonnant la restitution d’un Pissarro spolié, un tribunal parisien formule un jugement historique. Par un subtil jeu du droit de la propriété et de la compétence de la justice française, le marché de l’art et ses intermédiaires devraient en subir les conséquences.
La demande en restitution de La Cueillette des pois de Camille Pissarro a été trop vite classée au rang d’une énième affaire de spoliation et la portée du jugement du 7 novembre, sous-estimée. Si celui-ci est confirmé en appel, les conséquences peuvent être lourdes pour les acquéreurs sur le marché de l’art, les intermédiaires des ventes, voire pour l’obtention de prêts venant d’outre-Atlantique. «Rares sont les jugements en droit privé sur les spoliations, c’est-à-dire entre particuliers. D’ordinaire, le particulier s’oppose à la puissance publique [un musée], ou alors il y a une résolution à l’amiable. Ici, le tribunal français juge donc une vente courante américaine par le prisme d’un droit national», remarque le juriste Pierre Noual. Constitué devant la justice française, le dossier aurait pris une tout autre tournure devant les tribunaux américains. Ce scénario pouvait s’imposer étant donné que les propriétaires actuels, les époux Toll, sont américains, ainsi qu’une partie des demandeurs, les ayants droit Bauer. Rappel des faits. Fin 1943, quatre-vingt-treize toiles appartenant à Simon Bauer sont mises sous séquestre par le Commissariat aux questions juives. Parmi ce fonds, La…
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