Ce Persée et la Gorgone ou Petit Persée, exécuté entre 1903 et 1905 par Camille Claudel, est réapparu lors d’une vente caennaise, et a suscité bien des convoitises.
Ses 270 000 € sont une belle surprise pour ses derniers propriétaires, qui doutaient de son authenticité avant d’en avoir le cœur net après expertise. C’est un acheteur français qui emportait la pièce, d’autant plus rare qu’on en connaît seulement six exemplaires, à ce jour. À l’origine de cette épreuve à la composition tournoyante, il y a un grand marbre exposé en 1902, lors de sa dernière participation au Salon de la Société nationale des beaux-arts ; une sculpture qui sera reprise ici en réduction aux trois quarts. On la doit au marchand-éditeur Eugène Blot (1857-1938), qui diffusera le travail de Camille Claudel, la représentant dans sa galerie du boulevard de la Madeleine. En décembre 1905, il lui consacre une exposition, où parmi onze bronzes, trône le Persée, qui intégrera le fonds permanent du galeriste. Comme beaucoup d’œuvres de la sculptrice, celle-ci comporte sans doute une grande part autobiographique : elle pourrait s’y être mise en scène, donnant ses propres traits au visage de la Gorgone que brandit, précautionneusement, le héros grec. Une manière créative et presque thérapeutique d’exorciser ses graves problèmes existentiels… Plus tard, son frère Paul notera que «de toutes ses œuvres, Persée et la Gorgone reste la plus tragique».