Si, ainsi que l’article accompagnant l’œuvre faisant la couverture de la Gazette no 6 (page 6) vous le rappelait, Rembrandt Bugatti (1884-1916) s’est particulièrement attaché à saisir l’élégance de la panthère et du guépard ou la force vive du tigre, le sculpteur italien n’a cependant pas dédaigné le roi des animaux et sa plastique superbe. Tous les fauves, dans leur majestueuse diversité, le retiendront durant de longues heures d’observation patiente, vécues au Jardin des Plantes de Paris puis au zoo d’Anvers. La preuve avec les 806 000 € attrapés par ce Lion couché dévorant, modelé vers 1908 avant d’être fondu comme il se doit par la maison Hébrard et ici, plus précisément, par Albino Palazzolo. Ce modèle des plus rares, puisqu’il n’a fait l’objet que de trois épreuves, provient de l’ancienne collection d’un philanthrope et entrepreneur rémois et présente un sujet «bestial» tout à fait original dans l’œuvre de Bugatti. Le félidé est en effet représenté ici dévorant sa proie. Un thème inusuel chez l’artiste, essentiellement traité entre 1908 et 1912 et qui ne figure pas dans les cinquante premières œuvres référencées sur le site Artnet. On y voit la racée Lionne de Nubie, le touchant Lionceau et lévrier entre ses pattes, la joueuse Lionne à la boule ou encore le couple de Lion et lionne de Nubie, mais point de scène de festin. Le carnivore y effectue donc une entrée remarquée ! De ce thème réaliste et agressif, Antoine-Louis Barye (1795-1875) s’était fait une spécialité qui le fit admirer au XIXe siècle. Plusieurs pièces de ce grand nom dans l’univers fourni des animaliers se retrouvaient dans les cages voisines de ce lion, et notamment une version de son fameux Cheval turc no 2 patte antérieure gauche levée (29 x 31,5 x 12,5 cm), hennissant à 13 000 €. Barye, celui qui en pleine période romantique impose la figure animale, a vite été rejoint par de nombreux confrères, dont Christophe Fratin (1801-1864), choisissant l’humour comme mode d’expression pour ses singes et ses ours, transposés dans des attitudes humaines. Ce qui ne lui interdisait pas un petit détour du côté des «big five» ! Un placide mais très présent Rhinocéros d’Asie (9,5 x 18,1 x 8,3 cm), une pièce unique, le rappelait à 15 600 €.