Allongée dans une position de délassement extrême, la tête tournée vers le ciel, cette figure allégorique de la béatitude appelle au bonheur et au repos. Pourtant, les plis de sa tunique marqués, les angles aiguisés en arêtes et son visage ouvert, mutilé, attestent d’une originalité, celle des œuvres d’Ossip Zadkine. «Je pense que les sculpteurs de ma génération tels que Gaudier-Brzeska, Villon, Archipenko, Brancusi, Lipchitz et moi-même, déclarait Zadkine, pouvons être considérés comme les continuateurs de l’antique tradition de ces tailleurs de pierre et de bois, qui, partis de la forêt, chantaient librement leurs rêves d’oiseaux fantastiques et de grands fûts d’arbres», revendiquait-il. Peintre et sculpteur, il fut marqué par les arts primitifs et le cubisme avant de se tourner vers l’Antiquité, à l’instar de nombre d’artistes des années 1930, en tête desquels Pablo Picasso. Zadkine effectue d’ailleurs un voyage en Grèce, en 1931. Les thèmes de la mythologie le passionnent. Ses figures de Niobé ou La Naissance de Vénus, sans pour autant oublier l’influence cubiste, aspirent à une nouvelle forme de lyrisme, plus dynamique et plus émotionnel. Grand amateur de la taille directe depuis sa jeunesse, Zadkine la délaisse également à cette époque, pour se tourner vers des modèles en plâtre ou en terre qui seront fondus en bronze, le matériau de prédilection des grands sculpteurs de la Grèce antique…