Star de la vente Empire, madame Récamier reçoit un record mondial et retrouve les ors du Louvre.
Dans la chambre de Juliette Récamier (1777-1849), lieu couru du Tout-Paris aux plus grandes heures du Consulat, se trouvaient des meubles et objets de la plus grande qualité. Parmi eux, cette torchère en bois peint vert et doré, que l’on imagine aisément éclairer de ses neuf branches de lumière des conversations ô combien animées et forcément savantes (voir l'article La torchère de la chambre de Juliette Récamier, icône du goût antique de la Gazette n° 41, page 29). Cet objet d’art sommé d’un ananas, réalisé d’après un modèle dessiné par Charles Percier et son élève le plus talentueux – l’architecte et grand ordonnanceur de l’hôtel particulier – Louis-Martin Berthoult, rejoint le département des Objets d’art du Louvre, où trône déjà le lit en acajou de la belle égérie, accompagné de deux petites tables de nuit – trois pièces achetées par les amis de l’établissement en 1991 aux héritiers de Mosselman. Le musée l’a en effet acquis par la voie de la préemption pour 86 770 €. Il n’a en revanche pas agi pour le lit proposé lors de cette vente – et personne d’autre non plus d’ailleurs –, qui il est vrai n’était pas celui de la dame, mais une réplique. Celui-ci fut commandé par le banquier ayant racheté l’hôtel de la rue du Mont-Blanc au couple connaissant des revers de fortune. La pièce la plus attendue était cependant cette statue en marbre du Silence, une reprise de la Femme barbare ou Thusnelda du musée des Offices à Florence (voir l'article La torchère de la chambre de Juliette Récamier de la Gazette n° 40, page 13 et page de gauche). L’œuvre, d’une facture exemplaire et aux plis du dos d’un admirable travail de ciseau, a été sculptée par le Lyonnais Joseph Chinard vers 1798, alors que Juliette a 21 ans et entre dans la plénitude de sa beauté. Posée sur un socle en acajou orné d’une inscription latine pouvant se traduire par «Elle protège les songes et les amours, complice de la couche», madame Récamier offrait à 918 720 € un record du monde à son auteur (source : Artnet). Napoléon lui fit payer son opposition du prix de l’exil, mais trop tard : c’est chez elle que le style Empire vit le jour, et cela, il ne put le lui enlever.