Renouveler la faïence de Quimper et réveiller l’art populaire breton, telle est l’ambition de Victor Lucas (1897-1958) lorsqu’il fonde la manufacture Keraluc (contraction de Ker ar Lucas, «la maison de Lucas»), en 1946. Issu de l’École nationale de céramique de Sèvres, cet ingénieur a fait ses armes chez Henriot et HB – les deux maisons historiques de la ville – et conçoit son entreprise comme un véritable foyer artistique, ouvert à l’innovation et à l’expérimentation. «La faïencerie est restée active jusqu’en 1984 : nous ne pouvions montrer toute la production des ateliers Keraluc, explique Jérémy Varoquier, assistant du conservateur Bernard Verlingue. L’exposition se concentre sur la première génération d’artistes, de 1946 à 1958. Ensuite, l’entreprise se tournera vers le grès, et ce sera une autre époque». Les cent cinquante pièces du parcours – pour la plupart uniques, conservées en mains privées et peu ou jamais exposées – rendent hommage, autour de la figure du fondateur, à six créateurs de styles différents : le sculpteur et joaillier Pierre Toulhoat, le dessinateur de presse Yvain, les céramistes André L’Helguen et Jos Le Corre, et les peintres René Quéré et Xavier Krebs. Ce dernier est particulièrement à l’honneur, avec un remarquable ensemble qui, à lui seul, justifierait la visite. «C’est par la faïence que Xavier Krebs va basculer dans l’abstraction, poursuit Jérémy Varoquier. Il a apporté du neuf à la production quimpéroise en jouant avec les émaux, les textures, en donnant davantage d’importance à la couleur». Un bel avant-goût du talent de cet artiste, en prélude à la rétrospective de son œuvre peint, prévue à Quimperlé au printemps 2021.