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Pierre Soulages, colosse de Rodez

Publié le , par Virginie Chuimer-Layen

À l’occasion de l’ouverture de son musée, le dernier grand de la peinture française nous reçoit pour nous parler de ce qui l’anime. Moments d’exception.

Pierre Soulages.© Cédric Méravilles, musée Soulages, Rodez  Pierre Soulages, colosse de Rodez
Pierre Soulages.
© Cédric Méravilles, musée Soulages, Rodez
Rencontrer Soulages, c’est avoir rendez-vous avec l’histoire de l’art du XX e  siècle, de la préhistoire – des grottes d’Altamira aux statues-menhirs du musée Fenaille à Rodez –, du Moyen Âge roman et de la pré-Renaissance, et surtout avec celle qui n’existe pas encore… C’est aussi être en présence d’un colosse vivant à l’accent aveyronnais chantant, stèle ruthénoise d’un mètre quatre-vingt-dix environ, taillée il y a quatre-vingt-quatorze ans dans un grès et un cuir très résistants. Nous avons rencontré cet homme éternellement vêtu de noir, à la mémoire phénoménale et à l’élégance discrète, à Paris, chez lui et dans son atelier, ainsi que dans sa maison sétoise. À chaque fois, le peintre nous a reçus avec générosité et confiance, préférant aux mondanités la simplicité de relations authentiques. Évoquer sa vie et son œuvre en quelques lignes semble une gageure. Son biographe, Pierre Encrevé, la raconte en plusieurs tomes épais – notamment pour les peintures –, et de riches catalogues sont publiés à chacune des nombreuses manifestations lui étant dédiées en France et à l’étranger. La dernière a débuté le 24 avril à New York, chez Dominique Lévy, associée à Emmanuel Perrotin, peu avant l’ouverture prochaine de son musée. D’une manière synthétique, son parcours est rythmé par des accidents et des rencontres. À côté de celle majeure avec la peinture, son épouse Colette Llaurens, connue en 1941 à l’école des beaux-arts de Montpellier et qui accomplit dans l’ombre depuis plus de soixante-dix ans un travail titanesque, en est une fondamentale. Beaucoup de personnes marquèrent aussi très tôt sa carrière, par leur présence et leurs bons mots, dont l’artiste aime à rappeler l’essence. Soulages, né en 1919, s’oriente vers la peinture après avoir passé la première partie du baccalauréat, en 1938. La même année, il s’inscrit au cours de René Jaudon, professeur de dessin à Paris, qui s’étonne : «À un gaillard comme vous, toutes les audaces sont permises !» Plus tard, l’écrivain et ami de cœur Joseph Delteil, qu’il fréquente à Montpellier entre 1942 et 1945, s’exclame : «Vous prenez la peinture par les cornes, c’est-à-dire par la magie !» Enfin, en 1947, au Salon des surindépendants de Paris, Francis Picabia est interpellé par une œuvre du jeune artiste et lui répétera cette phrase, entendue un jour de la bouche de Camille Pissarro  : «Avec l’âge que vous avez et ce…
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