Issu d’un modèle imaginé lors du premier voyage en Océanie de l'artiste en 1892, mais fondu vers 1959 par Valsuani, ce totem évoque encore la tradition chrétienne, toutefois revisitée par les arts primitifs.
Ses sculptures ne se vendant pas, au contraire de ses peintures, c’est dans ce domaine que Paul Gauguin alla le plus loin dans sa recherche d’un art primitif. Ces œuvres devaient inspirer Matisse, Degas et Picasso, ce dernier l’étant tout particulièrement, dans ses Demoiselles d’Avignon, par les panneaux de bois de la Maison du jouir. D’un modèle conçu vers 1892 en bois de toa (bois de fer), cet exemplaire posthume du Cylindre au Christ en croix a été fondu vers 1959 à la cire perdue par Valsuani. Après avoir organisé une vente de ses œuvres afin de financer son voyage, l'artiste part pour son premier séjour en Polynésie en 1891. Il se rend à Tahiti et sur les îles Marquises, où il est finalement déçu de ne pas trouver d’œuvres d’art, notamment religieuses, la plupart ayant été détruites par les colons. Ayant apporté avec lui ses ciseaux de sculpteur, il se lance alors dans un travail de reconstitution de ce monde et de ces croyances perdues. Mais il va en réalité produire une sorte de panthéon syncrétique dans des œuvres d’un primitivisme nouveau. Il travaille tout d’abord sur du bois de goyavier avant de passer à celui de fer en septembre 1892. Mais personne ne voudra de ces « bibelots sauvages », qui resteront ainsi en petite quantité. Il en confiera une partie à son ami George Daniel de Monfreid en 1900, qui les rapportera en France avec pour consigne de ne les vendre qu’à des gens passionnés. Une autre partie sera rapatriée après sa mort en 1903. Il faudra encore quelques années avant que les artistes et les collectionneurs occidentaux ne découvrent et n’apprécient à leur juste valeur ces œuvres éminemment modernes.