Cui-cui et pépiements extraordinaires... Lors de la 23e vente menée à Cheverny, de fabuleux oiseaux chanteurs devraient s’envoler bien haut. Musique maestro !
Depuis toujours, les oiseaux se nichent dans les chansons. De la comptine enfantine À la volette aux mélodies d’Olivier Messiaen, ils sont musique... qu’on se le dise. Papageno, le joyeux oiseleur de La Flûte enchantée les attirent et les dressent pour les faire aussi merveilleusement chanter. Serinette, perroquette et merlinette enseignent également le chant aux oiseaux. Les tentatives d’imiter leurs aubades séraphiques sont anciennes – et ils figurent sans doute parmi les premiers automates. Il fallut toutefois attendre le XVIIIe siècle pour que les oiseaux mécaniques prennent leur envol. Ils miment avec réalisme l’attitude de leurs modèles, dont ils sifflent les trilles. Rivalisant d’ingéniosité, ils gazouillent gaiement dans les salons et les cabinets de curiosités. Ils peuvent encore surgir de luxueuses tabatières, loger dans de précieux étuis à broder, ou même garnir des pistolets ; sortant du canon, ils chantent en battant des ailes avant de disparaître. Bien sûr, ils embellissent également les pendules. Les oiseaux chanteurs répondent avec panache au goût des nobles et des bourgeois curieux de nouveautés techniques. Très appréciées dans les cours européennes, les fastueuses volières horlogères deviennent la spécialité de Jaquet-Droz, une maison chaux-de-fonnière. On lui attribue d’ailleurs l’invention, au milieu du XVIIIe siècle, du sifflet à piston coulissant, dont les notes imitent au plus près celles des oiseaux. Grâce à lui et à la miniaturisation des serinettes, les mécanismes participent pleinement de l’illusion. Notre splendide cage à automates n’est-elle pas d’abord un superbe objet décoratif ? Posée sur quatre pattes d’oiseau agrippées à des boules, affectant la forme d’une tonnelle miniature, elle se farde de charmants atours. À la base, deux médaillons peints sur émail évoquent l’univers des pastorales chères au peintre François Boucher ; un élégant jeune homme joue de la musette de cour, contant tour à tour fleurette à une blonde et une brune. Une fois suspendue, la cage dévoile le cadran d’une pendule. Prodige d’horlogerie – on n’en connaît qu’une vingtaine d’exemplaires – elle est attribuée à Jaquet-Droz, fournisseur attitré de Marie Antoinette.
Notre cage à oiseaux automates est en effet proche de modèles conservés au British Museum de Londres et à la Cité Interdite à Pékin. Pedigree non négligeable, elle provient de l’ancienne collection de la comtesse de Noailles, nommée en 1774 première dame d’honneur de la reine. Ce chef-d’oeuvre technique est évidemment animé d’un mécanisme des plus perfectionnés. Deux serins bleu et jaune, appartenant à une espèce aujourd’hui disparue, reposent sur des perchoirs, soutenus par une fontaine en verre de Venise ; hochant la tête, ouvrant et fermant le bec, ils agitent leurs ailes tout en tournant sur eux-mêmes. Les amoureux de l’horlogerie de précision seront encore comblés par la complexité de la serinette, façonnée en peau de buffle et placée dans la base. À chaque heure et à la demande, l’orgue se met en marche faisant jouer aux oiseaux cinq airs différents. Avec rigueur et précision, décor, mécanisme et oiseaux chanteurs composent un hymne sans fausses notes, orchestré par cette merveille de prouesses techniques et ludiques. Laissez-vous à votre tour émerveiller par nos serins enchanteurs, et "regardez-les s’envoler, c’est beau".