Oman s’invite à Lyon

Ponctuée d’arches en ogive rappelant celles de l’entrée du Musée national d’Oman, habillée des photographies de Ferrante Ferranti faisant alterner paysages grandioses – entre déserts, mer et montagnes – et personnages en costumes traditionnels, la scénographie couleur mer et sable pose le décor. Première exposition française sur la culture d’Oman organisée en dehors de Paris, la manifestation lyonnaise est aussi le second volet d’un partenariat entre les deux pays, liés depuis le XVIIe siècle – à la faveur de l’important commerce international qui fleurit alors en marge de la péninsule arabique –, visant à faire découvrir leurs patrimoines respectifs. Après qu’une vingtaine d’œuvres des collections lyonnaises a été récemment présentée à Mascate sur le thème de «La route des parfums», vingt-quatre objets omanais datant de l’Antiquité au début du XXe siècle s’offrent à voir au deuxième étage du palais Saint-Pierre. Autant de clés pour un voyage spatio-temporel envoûtant. Qui sait que la civilisation Magan désigne celle s'étant développée dans cette frange de terre en bordure de la mer d’Oman dès le milieu du troisième millénaire avant notre ère, en lien avec celles mésopotamienne et de l’Indus, grâce à ses gisements de cuivre et de diorite ? Des matériaux recherchés qui ont aussi servi de matière première à la confection d’objets rituels et utilitaires au décor raffiné. Remontant à l’âge du fer, un étonnant serpent métallique témoigne du culte alors voué à l’animal chtonien, associé à l’eau, à la fertilité et à la production métallurgique. Et qui connaît le nom du Boswellia sacra ? Cet arbre à encens, dont la précieuse résine assure depuis des millénaires la fortune de ses exploitants, pousse dans la région du Dhofar, entre Oman et le Yémen. La fragrance subtile et profonde, qui peut être enduite sur le corps ou brûlée, fait l’objet depuis l’Antiquité d’une véritable industrie et d’un commerce intense dans les villes côtières de Sumhuram (actuelle Khor Rori) puis de Mirbat, à l’extrême sud.
L’Oman islamique
Qui encore a connaissance de l’ibadisme, la troisième voie de l’islam aux côtés du chiisme et du sunnisme, qui se caractérise par son ouverture et sa tolérance ? L’avènement de cette religion au VIIe siècle et l’arabisation de la région de la péninsule Arabique conduisent au rapprochement de nombreuses tribus au sein du dar al-islam («maison de l’islam»), qui partagent une langue et des valeurs communes. Leurs mosquées sont ornées de délicats décors en céramique, et même de fragments de porcelaine chinoise bleu et blanc – développée sous les Ming – dans l’ancien port de Qalhât, stratégiquement positionné sur la côte orientale entre l’Afrique, l’Iran, l’Inde et l’Asie. Les connaissances développées par les savants arabes qui traduisent et commentent des textes anciens – ayant trait à la philosophie, à la médecine, aux mathématiques, à la géographie et à l’astronomie – se diffusent sous forme de manuscrits illustrés. L’art de la calligraphie s’accompagne de celui, tout aussi raffiné, de la gravure et du nielle dans la confection des porte-calames et autres encriers. Le travail du métal, qu’il s’agisse de cuivre, d’argent ou même parfois d’or, se décline par ailleurs dans les divers accessoires et éléments ornementaux des costumes traditionnels : corne à poudre (talahiq), offerte traditionnellement aux jeunes garçons à l’occasion de leur circoncision, et poignard (khanjar) pour les hommes, les parures de tête, de cou, de bras, de main ou même de pied revenant aux femmes.