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Nouveau réalisme : quand César magnifie le bois

Publié le , par Philippe Dufour
Vente le 24 mai 2023 - 14:00 (CEST) - 5, rue Cruche-d'Or - 87000 Limoges

Pièce exceptionnelle dans le long corpus du maître marseillais, cette construction insolite témoigne avec éclat de sa jonction officielle avec les nouveaux réalistes.

César Baldaccini, dit César (1921-1998), Agrafes sur bois, 1963, lames de bois agrafées... Nouveau réalisme : quand César magnifie le bois
César Baldaccini, dit César (1921-1998), Agrafes sur bois, 1963, lames de bois agrafées sur panneau de bois, 165 x 125 cm (détail). © SBJ / ADAGP, PARIS 2023
Estimation : 15 000/30 000 €

Attention, chef-d’œuvre en vue avec Agrafes sur bois, exécuté par César en 1963 ! Issue d’un bel ensemble constitué par un collectionneur du Limousin (et longtemps le collaborateur d’une célèbre galerie d’art parisienne), cette pièce illustre une étape singulière dans le parcours créatif de l’artiste. Comme la plupart des réalisations de l’inventeur des «Compressions», l’artefact est fait de matériaux de récupération – en l'occurrence des lamelles de bois qui pourraient être des copeaux ou des chutes ramassés chez un menuisier. César entraîne ici le spectateur dans une dimension plus picturale que celle de son univers habituel, post-industriel. D’abord, en raison de son support, un panneau rectangulaire classique pris dans sa hauteur, comme en usent tous les peintres. Et aussi par son apparence poétique, évoquant un paysage matiériste, fait de gonflements, vallonnements ou vagues, rendus par une technique surprenante : l’agrafage. L’œuvre acquiert quelque chose du trompe-l’œil cher aux surréalistes, tout en demeurant dans la longue tradition du collage, mis au point au début du XXe siècle. De fait, Agrafes sur bois s’inscrit dans le courant du nouveau réalisme, ce mouvement d’avant-garde initié par le plasticien Yves Klein et le critique Pierre Restany en 1960. Préconisant la collecte d’éléments de la vie quotidienne, et leur assemblage, souvent par le collage, ces artistes affichent une vision similaire du monde, qui, face à l’abstraction, s’attache à un retour à la réalité.

Matériau naturel
Depuis plusieurs années déjà, César mène une recherche permanente sur des volumes inédits, en s’aidant de toutes sortes de matériaux ordinaires et d’objets manufacturés. C’est en 1958 qu’il a élaboré le concept de ses légendaires «Compressions», à partir de carcasses de voitures et d’une «presse américaine» de ferrailleur. Du jamais vu en matière de création, et un procédé qui le rapproche des nouveaux réalistes. Aussi, en 1961, le sculpteur décide de rejoindre le groupe ; il y retrouvera son ami Arman, dont les méthodes iconoclastes sont proches des siennes, en particulier quand il s’attaque à des instruments de musique, tronçonnant ou brûlant leur structure de bois. Chez César, l’utilisation d’éléments de ce matériau naturel est plus rare, même si on la retrouve ponctuellement, à travers Cagettes par exemple, une spectaculaire compression murale de 1976 (collection privée). Quant à notre œuvre, elle a été reconnue pour son importance dès son apparition sur la scène artistique. En témoigne au dos (à côté d’une étiquette de la galerie Claude Bernard), un cartel affichant un numéro correspondant à celui donné lors de l’exposition de référence «Cinquante ans de collages», tenue au musée d’Art et d’Industrie de Saint-Étienne en 1964. Par ailleurs, Denyse Durand-Ruel a confirmé que l’œuvre était dûment répertoriée dans ses archives, sous le numéro 363. Bien des atouts donc, pour une pièce que l’on peut véritablement qualifier de «muséale».

Tableaux, mobilier et objets d'art, sculptures, bronzes
mercredi 24 mai 2023 - 14:00 (CEST)
5, rue Cruche-d'Or - 87000 Limoges
Pastaud
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