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Nguyen Nam Son, hommage maternel et national

Publié le , par Christophe Provot
Vente le 30 mars 2023 - 15:00 (CEST) - 174, rue du Faubourg-Saint-Honoré - 75008 Paris

Artiste emblématique de l’école des beaux-arts de l’Indochine, Nguyen fait honneur à sa mère dans un portrait hiératique, très admiré lors de son exposition à Paris en 1932.

Nguyen Nam Son (1890-1973), Portrait de ma mère, 1930, huile sur soie et laque dorée... Nguyen Nam Son, hommage maternel et national

Nguyen Nam Son (1890-1973), Portrait de ma mère, 1930, huile sur soie et laque dorée marouflée sur toile, 170 x 103,5 cm.

Estimation : 200 000/300 000 €

Le nom de Nguyen Nam Son, de son vrai nom Nguyen Van Tho (1890-1973), fait des apparitions remarquées sur le marché hexagonal depuis une quinzaine d'années, sa première adjudication en salle remontant à 2009. Né le 15 février 1890, le peintre vietnamien acquiert ses premiers rudiments d’art occidental auprès du sculpteur Émile Boudon au lycée du protectorat de Hanoï. C’est par l’intermédiaire de Paul Monet – capitaine d’infanterie coloniale et fondateur du Foyer des étudiants annamites – qu’il fait la rencontre de Victor Tardieu en 1922. L’entente est immédiate, ce qui conduit ce dernier à associer le jeune peintre à la création de l’école des beaux-arts de l’Indochine, entérinée le 27 octobre 1924. Nommé secrétaire, Nam Son s’embarque pour la France de janvier à septembre 1925 afin de recruter des professeurs et fournir le jeune établissement en matériel. A Paris, il parfait sa formation auprès de Jean-Pierre Laurens et du décorateur Félix Aubert, se liant d’amitié avec des artistes venus de loin, tels le Chinois Xu Beihong ou le Japonais Foujita. De retour au Vietnam, il organise le premier concours d’admission à l’école, le 5 octobre 1925. Il y enseignera pendant 18 ans, ayant contribué à former les plus grands noms de l’art vietnamien moderne. A sa mort le 26 janvier 1973, il laisse plus de quatre cents œuvres, peintures et dessins témoignant tous d’une riche activité artistique.
 

Un portrait promotionnel

Si la majorité de ses œuvres sont aujourd’hui conservées au Vietnam, quelques-unes subsistent en mains privées hors du pays. C’est le cas de cette huile sur soie et laque dorée marouflée sur toile, sobrement intitulée Portrait de ma mère. Son estimation de 200 000/300 000 € est à la hauteur de la découverte que constitue cette œuvre, inédite en salle. D’un grand intérêt, tant historique qu’artistique, elle fut présentée à deux reprises à Paris : une première fois en 1931 lors de l’Exposition coloniale, puis au Salon des artistes français, au Grand Palais en 1932, où elle fut gratifiée de la médaille d’argent. Très admirée lors de cette seconde manifestation, elle fut acquise par Henri Sambuc, vice-président de l'Association amicale des Français d’Indochine, dont il enrichit les locaux parisiens en y exposant le portrait. Il y reste jusqu’en 1944, année de son décès, jusqu'à son rachat Jean-Yves Bureau, industriel et collectionneur d’art d’Asie et demeuré dans sa famille jusqu’à ce jour.
 

Nguyen Thi Lan, mère de l’artiste, est représentée assise sur une chaise, vêtue d’une robe verte aux manches larges et portant une coiffe traditionnelle. Elle arbore une médaille offerte par l’empereur Bao Dai en 1927, en reconnaissance des sacrifices qu’elle fit pour la réussite de son fils, ainsi qu’un chapelet autour du cou. L'inscription en bas à gauche renseigne sur la démarche de Nam Son, son état d’esprit au moment où il l’exécute cette œuvre. Effectivement, la mention « Le fils Nguyen Van Tho se prosterne en dessinant » renvoie à une dimension d’hommage. Plutôt que de la représenter dans l’intimité, il choisit de la peindre dans une tenue bouddhiste, un livre de prière dans les mains, renvoyant l’image d’une femme lettrée. Il monumentalise sa mère, tant par le format (170 x 103,5 cm) et le cadrage adopté – à la fois serré et distancié –, que par le vêtement ample qui lui dissimule le corps. Nam Son sait que l'œuvre sera exposée à l'autre bout du globe. Plus encore qu'un témoignage de piété filiale, elle fonctionne comme une vitrine de ce que les élèves de l’école des beaux-arts d’Hanoï sont capables d’accomplir – à la fois la démonstration de leur talent et de la qualité de l’enseignement reçu.

jeudi 30 mars 2023 - 15:00 (CEST) - Live
174, rue du Faubourg-Saint-Honoré - 75008 Paris
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