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Memento mori, ou l’art et le plaisir de méditer au musée des beaux-arts de Lyon

Publié le , par Armelle Fémelat

Le musée des beaux-arts de Lyon met en scène des vanités produites entre la Renaissance et aujourd’hui. Une invitation à réfléchir sur la fugacité de la vie et l’urgence d’en savourer tous les plaisirs.

Nicolas Régnier  (vers 1591-1667), Jeune femme à sa toilette, vers 1630, huile sur... Memento mori, ou l’art et le plaisir de méditer au musée des beaux-arts de Lyon
Nicolas Régnier  (vers 1591-1667), Jeune femme à sa toilette, vers 1630, huile sur toile, Lyon, musée des beaux-arts. 
© Lyon MBA - Photo Alain Basset

À la mort, à la vie !», clame le titre de l’exposition dans un jeu de mots facétieux détournant l’expression consacrée. Mais ce n’est là ni par coquetterie ni par provocation. «La mort n’est pas le sujet : celle-ci traite au contraire de la vie, précise Ludmila Virassamynaïken, sa commissaire, également responsable des peintures et des sculptures anciennes du musée des beaux-arts de Lyon. La mort n’est pas non plus l’objet des artistes. Pas de morbide dans leurs œuvres mais de la beauté, de l’esthétique, avec souvent de l’humour et presque toujours un pas de côté.» Nombreuses sont les bonnes raisons d’aller découvrir cet accrochage, à commencer par la qualité et la diversité de ce qu’il présente. Pas moins de cent soixante œuvres donnent à voir la vanité des prétentions humaines et la finitude de toute chose : des sculptures, peintures, gravures, dessins, photos, vidéos et installations produits entre la Renaissance et aujourd’hui, en Occident pour la plupart mais avec quelques exceptions venues d’Afrique et d’Asie. Exhumés des réserves muséales ou provenant d’une collection privée, nombre d’entre eux sont montrés au public pour la première fois. À l’origine de l’exposition se trouve ainsi la proposition d’un couple lyonnais, engagé de longue date auprès du musée, de mettre à disposition son propre fonds. Une quarantaine d’objets ont par ailleurs été restaurés et un très bel ensemble d’estampes anciennes, provenant d’un legs du XIXe siècle, redécouvert et étudié à cette occasion (voir l'article Les estampes méconnues d’un legs lyonnais de la Gazette n° 1, page 138). Jeux de mots et calembours visuels sont habilement mis en scène dans un parcours ponctué de cimaises aux couleurs vives et de perspectives signifiantes. «Celui-ci génère bien des surprises. Les vanités peuvent en effet prendre des formes inattendues», selon Ludmila Virassamynaïken. Dix sections thématiques en illustrent les grandes déclinaisons formelles et iconographiques au fil des siècles, des lieux et des cultures. «J’ai constaté une grande continuité entre les époques et de beaux dialogues entre les œuvres… Quelques inflexions aussi et assez peu de ruptures, permettant de fructueuses correspondances de part et d’autre». «Entrez dans la danse», «Les âges de la vie», «Fragiles jeunesses», «Vanité des vanités», «Vanité des arts et des savoirs», «Méditations», «Des plaisirs qui partent en fumée», «L’absente de tous bouquets», «La vie précieuse» et «Le miroir animal» : tels sont les titres poétiques de cette déambulation artistique et philosophique placée sous les auspices de Lucas de Leyde, Rembrandt, Willem Claesz Heda, Louis Janmot, Picasso, Étienne-Martin, Bill Viola, Philippe Cognée, Éric Poitevin… «Le sujet s’inscrit délibérément dans le contexte pandémique actuel», affirme la conservatrice. Ainsi cette plongée dans les vanités d’hier et d’aujourd’hui offre-t-elle, sinon des remèdes, du moins des échappées belles… Concomitants de la Peste noire de 1348, les danses macabres médiévales et le motif du triomphe de la mort, qui ouvrent le bal, rappellent que les grandes épidémies ont toujours donné matière à création et à réflexion. Et les crânes, sabliers, bulles de savon, volutes de fumée, écorces d’agrumes et autres papillons, déployés depuis le XVIe siècle, sont autant de symboles nous exhortant à profiter des joies de ce monde, fragile et fugace.

«À la mort, à la vie ! Vanités d’hier et d’aujourd’hui», musée des beaux-arts,
20, place des Terreaux, Lyon (69), tél. 
: 04 72 10 17 40.
Jusqu’au 7 mai 2022.
www.mba-lyon.fr
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