Carrefour culturel entre l’Afrique, l’Europe et le Moyen-Orient, Marrakech accueillait la 2e édition marocaine de 1-54, rendez-vous international dédié à la promotion de l’art contemporain africain et de la diaspora.
Installé depuis plusieurs années à Londres et à New York, cet événement posait une nouvelle fois ses valises dans la célèbre cité d’ocre. Durant quatre jours, happenings, vernissages, tables rondes quotidiennes et expositions se sont ainsi succédé en divers lieux de la ville, notamment au musée Yves-Saint-Laurent, à la maison Dar Moulay Ali ou encore à la Mamounia, joyau de l’architecture arabo-andalouse, où six mille visiteurs sont venus découvrir les œuvres d’une soixantaine d’artistes exposées par dix-huit galeries en provenance de toute l’Afrique, mais aussi d’Europe et des États-Unis. Dimanche, à quelques heures de la clôture, la grande majorité des galeristes affichaient un sourire radieux. Et le climat estival n’en était pas la seule raison. «Cette foire est particulièrement intéressante, dans le sens où elle est très intime et donc très intense en termes de rencontres», confie Erica Chammas, de la galerie Sulger-Buel. «Nous avons senti un réel intérêt de la part des collectionneurs, souvent francophones d’ailleurs.» Si le record des ventes revient à la galerie Poggi (Paris) avec une œuvre de Djamel Tatah acquise à 55 000 € par un prestigieux collectionneur marocain , l’enseigne londonienne a réalisé à Marrakech de belles transactions, à l’image d’un tableau de Soly Cissé (The Fugitive, 2017), vendu 10 000 €. Véritable base de lancement des artistes marocains, la galerie Atelier 21 (Casablanca) était également de la fête : «Ici, tout a été pensé pour favoriser les rencontres avec un public différent. Les collectionneurs ne sont pas les mêmes que ceux que l’on voit dans les grandes foires, et c’est aussi cela qui est si agréable. D’autant que des acheteurs ne manquent pas», indique sa directrice associée Nadia Amor, qui annonçait de «belles ventes», notamment sur les tableaux aux lignes aériennes de la Marocaine Najia Mehadji (jusqu’à 7 000 €).
Une 3e édition en préparation
Des affaires, la galerie Magnin-A en aura fait, elle aussi. «Nous avons pu finaliser de nombreux contacts noués l’an dernier et en créer de nouveaux, ce qui est très positif. Ça a très bien marché pour nous. Par exemple, un tableau comme La sape, c’est le défi quotidien (2017), du Congolais JP Mika, est parti à 20 000 €», notait l’assistante de la galerie, Pauline Giroux. S’il est vrai que l’art contemporain africain ne pèse pas encore lourd sur le marché mondial, cette seconde édition marocaine de 1-54 vient en confirmer l’effervescence, mais aussi l’intérêt grandissant des amateurs locaux, comme s’en félicite Touria El Glaoui, fondatrice de l’événement. «Pendant des années, la majorité des œuvres d’art contemporain africain étaient achetées par des collectionneurs internationaux et, peu à peu, c’est en train de changer. Développer l’enthousiasme d’une nouvelle génération de collectionneurs du continent et l’aider à soutenir ses propres artistes, au Maroc, mais aussi dans toutes les villes d’Afrique, est l’un des objectifs que je me suis fixés.» À ce titre, la directrice assure travailler à l’organisation d’une troisième édition à Marrakech, dès l’an prochain. «J’ai vraiment senti que toute la ville et les institutions étaient derrière nous. Cela donne envie de continuer.» En attendant, d’autres projets l’attendent. À commencer par la déclinaison new-yorkaise de 1-54 dont la 5e édition se déroulera en mai prochain mais aussi les préparatifs, à Rabat, d’une grande exposition consacrée à la carrière de son père, le peintre Hassan El Glaoui, décédé l’an dernier à l’âge de 94 ans et considéré comme l’un des pionniers de l’art contemporain au Maroc.