Mai-Thu, Lé Phô et Luong Xuân Nhi

Il est quasiment impossible de s’intéresser aux peintres de l’ancienne Indochine sans évoquer Mai-Thu et Lé Phô (1907-2001). Le premier, toujours plus recherché par les collectionneurs, était présent dans cette vente avec une encre et couleurs sur soie de 1944, une période charnière pour lui, titrée Mère et enfant dormant. L’œuvre, portant toute la délicatesse et l’élégance de son auteur, était enlevée à 462 960 €. Celui qui vit désormais en France y livre une vision nostalgique du Vietnam, rendue par l’emploi de couleurs tendres et harmonieuses, pour un sujet qui l’est tout autant. Deux autres œuvres de sa main, La Coiffure (22 x 20,4 cm) de 1958 et Femme à l’éventail (23,7 x 15 cm) de 1957, retenaient respectivement 91 000 et 84 500 €. La Méditation (27,7 x 24,2 cm) de Lé Phô, adjugée 271 560 €, s’inscrit dans la même veine et la même technique. Ce fils de vice-roi, issu lui aussi de la première promotion de l’École des00 beaux-arts d’Hanoï, livre avec cette encre et couleurs sur soie – exposée à Alger entre 1942 et 1944 à la galerie Pasteur – un délicat instantané d’intimité. Lui n’a pas abandonné la peinture à l’huile de ses débuts, ce que montrent  Les Deux Sœurs (73,5 x 50,1 cm), surprises dans leur complicité à 127 400 €. Plus rare mais tout aussi intéressant est Luong Xuân Nhi, dont cette Préparation de la fête du Têt, traitée avec une douceur de palette très personnelle, retenait 104 000 €. Originaire d’Hanoï, l’artiste tient une place à part dans l’histoire de l’art vietnamien du XXe pour avoir embrassé les thèses communistes. Aussi a-t-il livré – au retour d’un séjour de deux ans en URSS – des scènes sociales d’un grand réalisme ayant grandement contribué à sa notoriété. Le Têt est la fête la plus importante du calendrier national : elle annonce le début du nouvel an lunaire. Le choix de ce sujet n’est donc pas anodin dans la revendication d’une identité propre, tout comme sa transcription à l’encre et aux couleurs sur soie, l’ancrant pleinement dans la tradition.