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Les collections d’un lettré

Publié le , par Anne Doridou-Heim

Doté lui aussi d’un troisième œil, Gérard Lévy arpentait le monde de l’art à la recherche de l’objet écrivant son histoire, des civilisations asiatiques à la photographie ancienne.

Camille Dolard (1810-après 1884), Autoportrait en fumeur de narguilé dans un décor... Les collections d’un lettré
Camille Dolard (1810-après 1884), Autoportrait en fumeur de narguilé dans un décor oriental, 1845, daguerréotype pleine plaque, 16,5 x 21,3 cm (à vue).
Estimation : 40 000/60 000 €
Gérard Lévy (1934-2016), était une figure incontournable de l’Hôtel Drouot, connue et appréciée de tous pour son élégance – avec son légendaire œillet à la boutonnière, par ailleurs fil rouge des catalogues de ces ventes –, et son exquise politesse. Armé d’un sourire discret qui ne le quittait jamais, il explorait les salles, inlassablement, à la recherche de l’objet rare. Sans doute un homme du monde d’avant, cultivé, curieux et infatigable. Ses collections – demain dispersées par les maisons Ribeyre - Baron et Millon, associées pour l’occasion –, racontent un parcours à la croisée des chemins et des cultures, depuis une naissance à Casablanca dans une famille multipliant les racines. Diplôme de l’École du Louvre en poche, en 1960, il devient guide au musée. Le monde muséal lui ouvre les portes de ses merveilles ; il le fera sien, gagnant son surnom de «piéton des musées». Son histoire avec le marché, il va l’écrire lui-même. Un premier stand aux Puces dès 1964, puis l’ouverture de sa galerie au 17, rue de Beaune, dédiée aux arts d’Asie, puis à la photographie ancienne, passion développée dans les années 1970. Dans ces deux ventes à venir, comme dans ses collections, photographies anciennes et arts d’Asie font bon ménage, semblant même instaurer un dialogue. La raison en est simple : ils ont été regardés, sans tenir compte de leur dissemblance, par un homme qui les aimait pour leur caractère insolite et savait les associer au-delà de leur apparence. «Voir clair» est une notion récurrente de l’enseignement de Bouddha pour atteindre l’Éveil. Ce troisième œil, l’«Urna», celui qui permet de voir à l’intérieur, Gérard Lévy en était pourvu.   Laos, XV e -XVI e  siècle. Tête de Bouddha en bronze à patine brune, les yeux mi-clos exprimant la sérénité, les lèvres esquissant un léger sourire, présentant les signes de la bouddhéité, tels les oreilles aux longs lobes, les cheveux coiffés en boucles serrées surmontés de l’ushnisha, l’urna apparaissant sur le front sous forme d’un motif spiralé niellé (manquent la flamme ainsi que les yeux, originellement incrustés), h. 33 cm. Estimation : 12 000/15 000 € Les regards d’un découvreur Gérard Lévy est salué par la grande majorité de professionnels du monde de l’art comme un vrai connaisseur. Aucune pièce n’entrait par hasard dans sa collection. Au moment de sa disparition, le président des musées d’Orsay et de l’Orangerie, Guy Cogeval, avait tenu à lui rendre hommage, dans Le Figaro , en évoquant un «partenaire privilégié des équipes du musée d’Orsay depuis…
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