Entre colère et souffrance, joie et tristesse, peur et désespoir, passion et désir, émerveillement et surprise, nos émotions sont abondantes et fluctuantes, et leurs nuances d’une grande subtilité. Les artistes se sont emparés de ce sujet pour lequel ils disposent d’une palette d’expressions traduites par un regard, un geste, une attitude, ou un objet. Le musée Marmottan nous invite à plonger dans le théâtre de toutes ces émotions avec une exposition qui réunit près de 80 tableaux, provenant de collections publiques et privées, de Dürer, Champaigne, Fragonard, Boilly et Greuze à Dalí, Picasso, Léger ou Boltanski. L’objectif des commissaires est de montrer l’évolution et la diversité de la représentation de ces émotions à travers les siècles, du Moyen Âge à nos jours. Le choix de la période retenue ne manque pas d’ambition ! Et conduit parfois à traiter un peu trop vite certains aspects et à quelques conclusions hâtives. Comme de s’appuyer sur cette Sainte Madeleine en pleurs (vers 1525) au visage impassible, dont seul un mouchoir laisse trahir le chagrin, pour avancer que les émotions ne sont que suggérées chez les Primitifs. C’est sans compter sur certaines Pietà du Louvre. On survole les siècles au rythme de sections dont on ne comprend pas toujours le sens : des caravagesques qui s’emparent de ces maux de l’âme et les exacerbent par les mouvements, les attitudes et les clairs-obscurs, à Le Brun qui se passionne pour le sujet et publie en 1692 une Méthode pour apprendre à dessiner les passions. Du Verrou de Fragonard qui illustre le temps des Lumières où l’on célèbre les plaisirs galants, aux caricatures de Louis-Léopold Boilly et ses Trente-Cinq têtes d’expression (vers 1825), jusqu’aux artistes du XXe siècle, marqués par la guerre ou la psychanalyse, qui tentent de représenter l’inconscient. Cette traversée à vol d’oiseau de l’évolution de la sensibilité dans l’art manque de pédagogie et nous laisse sur notre faim.