Cette robe d’époque Louis XV entre dans les collections de l’institution parisienne par la voie de la préemption.
Elle était la plus belle pièce du dressing dispersé d’une noble famille du Comtat Venaissin dont était raconté un petit bout de l’histoire (voir l'article Une robe à la française du XVIIIe de la Gazette n° 11, page 69). Cette robe, taillée vers 1765 dans un taffetas de soie rose, est ornée d’un motif dit «ikaté» directement inspiré des tissus venus des Indes. Son parfait état de conservation, la rareté de son motif et sa traçabilité l’ont rendue hautement désirable pour le palais Galliera - musée de la Mode de la Ville de Paris, qui la préemptait pour 49 000 € – soit à près de quatre fois l’estimation. On le sait, pour enrayer la fuite des devises due au goût immodéré des élégantes du XVIIe siècle pour la soie étrangère, Colbert souhaite développer une puissante industrie textile nationale. Lyon en devient le cœur, notamment avec la Grande Fabrique, mais d’autres centres émergent aussi dans la vallée du Rhône, à Orange, à Nîmes… et atteignent également la perfection en matière de tissage du précieux fil, comme de la richesse de ses motifs et de ses coloris. Le dos du modèle est orné d’un empiècement en indienne portant la marque de Wetter. Cette manufacture a été inaugurée au XVIIIe siècle à Marseille par Jean-Rodolphe Wetter, avant de s’implanter grâce à des financiers à Orange en 1757 – afin de contourner le système d’interdiction et de taxes prohibitives : cela avec succès puisque l’on sait qu’en 1764 elle employait plus de cinq cents ouvriers et ouvrières et exportait ses toiles dans toute l’Europe. Cette robe disposait de bien des atouts dans ses manches pour retenir l’attention de l’institution parisienne, dont le département de l’histoire de la mode ne cesse de s’enrichir.