Ettore Spalletti (né en 1940) habite l’espace comme on compose un bouquet. En douceur, avec minutie et en silence, par une subtile juxtaposition de formes et de couleurs poudrées, l’artiste italien rend l’air vibrant et la lumière caressante. À Monaco, trente de ses productions diptyques monochromes, colonnes tronquées ou blocs d’albâtre rehaussés de feuille d’or, provenant principalement de son atelier des Abruzzes, ont investi les trois étages de la villa Paloma. Un savant jeu de volumes épurés jusqu’à la plus géométrique simplicité conjugué à la force des pigments qui les revêtent offre leur présence paisible aux pièces de l’ancien hôtel particulier, unissant dans leurs harmonies murs, plafonds et sols immaculés. Loin de présenter une rétrospective de son travail malgré la présence de pièces anciennes tel ce Disque de bois laqué noir (1981), le commissaire Cristiano Raimondi invite à une promenade immersive. À travers les fenêtres de la villa, tendues d’un voile blanc translucide, le paysage extérieur s’inscrit dans l’exposition, rappelant l’inspiration profonde d’un artiste qui, en révélant l’éclat de l’azur céleste et marin, efface l’horizon. Ici, toute trace de travail ou d’effort est absente pour ne laisser place qu’à une sensation joyeuse de la couleur, comme une échappée introspective voire spirituelle. Plans dilatés, volumes tronqués, dissonances et symboles s’imbriquent pour épouser le site en l’affranchissant de toute narration. Car, mieux qu’une mise en scène ou en espace, cette présentation tient de l’invite quasi initiatique. Tous les temps depuis les fresques crayeuses de la Renaissance , tous les paysages s’impriment dans ses aplats lumineux pour rendre hommage à la vie, à la nature, aux savoirs. Aussi, fermant le parcours, trois rayonnages de livres aux dos roses, bleus, gris, incarnent un hymne au temps long. Rien n’est montré, tout est dit.