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L’abstraction de Zao, une nature ressentie et rêvée

Publié le , par Anne Foster
Vente le 06 juin 2018 - 14:00 (CEST) - Salle 5-6 - Hôtel Drouot - 75009

Depuis la fin des années 1950, Paris bouillonne de mouvements picturaux qui n’ont rien à envier à ceux issus de l’école de New York. Émergent alors les peintures de Zao Wouki, soutenu notamment par un jeune critique d’art, Michel Ragon.

Zao Wou-ki (1920-2013), Composition, 1959, huile sur toile, 22 x 27 cm. Estimation :... L’abstraction de Zao, une nature ressentie et rêvée
Zao Wou-ki (1920-2013), Composition, 1959, huile sur toile, 22 x 27 cm.
Estimation : 120 000/150 000 €

Arrivé en 1948, à Paris, Zao était un artiste formé en Chine, avec une maîtrise de l’art traditionnel dont il pensait alors avoir à se défaire. Il était attiré par la peinture occidentale et voulait se mesurer aux grands maîtres comme Cézanne, qui l’accompagnera tout au long de son œuvre : regarder la structure de la nature, modulée par le jeu de la lumière, l’importance du vide  inhérent à la peinture chinoise. Il aurait pu être isolé par la langue, au contraire, avide de nouveauté, il rencontre des personnes qui reconnaissent tout de suite son talent singulier. Soulages, Hartung, Michaux… Des marchands importants comme Pierre Loeb, Myriam Prévost et Gildo Caputo, les fondateurs de la Galerie de France, qui le prennent sous contrat, et un critique d’art autodidacte, Michel Ragon. Vendéen, installé à Paris depuis 1945, celui-ci exerce divers petits boulots, s’installe comme bouquiniste de 1954 à 1964, et surtout écrit des poèmes, des romans, des articles pour de très nombreuses revues sur des sujets aussi variés que la littérature prolétarienne, l’anarchisme, l’architecture et l’art abstrait. Autant d’engagements auxquels il sera fidèle tout au long de sa carrière. Enfin reconnu, à partir de 1964, il voyage beaucoup, reprend ses études, interrompues au certificat d’études, obtenant un doctorat d’État à la Sorbonne en 1975, à plus de 50 ans, avec une thèse portant sur La Pratique architecturale et ses idéologies. Revenons en 1960, où les liens d’amitié entre Ragon et Zao sont particulièrement forts. Dans Autoportrait, ce dernier se souvient d’un épisode douloureux : «Le regard terrifié de mon ami Michel Ragon, rencontré quai des Grands-Augustins, courant derrière ma femme, dominée par un délire de persécution […] J’ai compris, ce jour-là, dans les yeux de Michel, dans quelle situation je me trouvais.» Deux ans plus tard, celui-ci lui consacre un article dans le numéro de janvier-février de Cimaise : «Lorsqu’il est en vacances, il ne regarde même pas la nature. Sans doute parce que la nature de ses tableaux est au plus profond de lui-même et que, involontairement, lorsqu’il se retrouve devant la toile blanche, il invente le paysage de ses rêves. […] Tout se confond, tout s’assemble, tout se métamorphose. Cézanne n’avait-il pas lui aussi senti le monde à la manière des sages chinois lorsqu’il disait qu’il voulait “unir des courbes de femmes à des épaules de collines”.» Ragon avait saisi la quintessence de l’art de son ami : «Paysage, peinture, le monde, le cosmos, la mer, la nature, pour Zao Wou-ki tout cela maintenant ne fait plus qu’un.» Ce tableau, «morceau de cet espace de rêve», selon le peintre, lui fut offert en gage d’amitié.

mercredi 06 juin 2018 - 14:00 (CEST) - Live
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