Belle moisson de résultats pour ce nouvel opus intitulé «Indochine, mythes et réalités 1800-1960». Emmenée par les 355 600 € un record mondial absolu (source : Artnet) d’une toile de Victor Tardieu (1870-1937), Étude pour la fresque de l’amphithéâtre de l’Université d’Hanoï intitulée «La Métropole : la science dispense au peuple d’Annam ses bienfaits», peinte vers 1924-1925, la vente se clôturait sur un produit total de 1 M€. Le musée Pasifika de Bali n’a pas laissé passer cette chance rare de se procurer une œuvre du cofondateur, avec le Vietnamien Nguyen Nam Son, de l’École des beaux-arts d’Hanoï. On le sait, un incendie ayant ravagé le fonds d’œuvres du peintre, elles sont désormais peu nombreuses en mains privées et donc particulièrement recherchées. Celle-ci présentait un atout supplémentaire en s’avérant être une étude pour la célèbre fresque commandée à l’artiste peu de temps après son arrivée au Vietnam, ainsi que la Gazette n° 35 du 12 octobre dernier (page 65) vous l’apprenait plus en détail.
Les lauréats des prix coloniaux s’en allaient pour deux ans grâce à une bourse qui leur offrait le voyage, mais, sur place, ils se devaient de réaliser une œuvre d’importance, souvent ode à la France civilisatrice. Après 1954, cette vaste fresque, allégorie de la puissance coloniale, n’est pas du goût du nouveau régime vietnamien, qui la fait recouvrir d’un badigeon blanc. Néanmoins, les souvenirs douloureux s’estompant, pour le 100e anniversaire de l’Université, le gouvernement décidera de la restaurer. Pour ce faire, il fera appel au peintre Hoang Hung, qui disposera de trois mois et de dix praticiens pour l’aider dans une tâche qui s’apparentera davantage à un travail de copie qui, malheureusement, n’aura pas la finesse de l’original. Victor Tardieu était parti pour séjourner dix-huit mois sur place. Il y demeurera finalement dix-sept ans et aura une action essentielle pour l’ouverture de l’art vietnamien à l’expression moderne. On ne reviendra pas ici sur son rôle essentiel dans l’épanouissement des peintres Lé Phô, Vu Cao Dam, Mai Trung Thu et de tant d’autres, dont l’auteur d’un beau dessin à la pierre noire, rehaussé de pastel et de gouache, à la signature non identifiée. Cette Élégante de Hanoï, arpentant les rues de sa capitale en 1938, ne manquait ni de charme ni de qualités picturales. Elle séduisait à 15 240 €… tout en conservant son mystère.