La répétition dans l’art serait-elle uniquement un processus de création ? «Pas forcément, mais elle peut le devenir», selon Éric de Chassey, commissaire de la manifestation messine. «C’est ce que j’essaie de démontrer à travers cette exposition. Je n’en ai pas de définition tranchée, mais je dirais pour paraphraser Deleuze que dans la répétition, jusqu’à l’obsession, on trouve de petites différences.» Le parcours débute avec un tableau de Marie Laurencin de 1936, très peu connu du public et ayant précisément pour titre La Répétition : une œuvre purement décorative à première vue, mais qui s’avère sans en avoir l’air être un pied de nez au monument que sont Les Demoiselles d’Avignon de Picasso. Le thème est ici décliné à travers treize salles, ou plutôt treize actes liés au processus en question — essayer, insister, multiplier, accumuler, redoubler ou encore recommencer –, liant chacun des artistes exposés à une phase de réflexion et de création propre à son œuvre. Annette Messager y apporte de la tendresse avec Les Pensionnaires, une série de petits oiseaux emmitouflés de tricots sous vitrines. Claude Viallat, en figure tutélaire du groupe Supports/Surfaces, devient l’évidence même de cette mécanique de réitération. Simon Hantaï, passé par le surréalisme, opte pour un «automatisme physique» résultant de la récurrence de gestes, alors que les portraits de Marlene Dumas se métamorphosent en redoublements identitaires. Le sens de la visite n’a aucune importance. «Ce qui prime, c’est le répétitif en tant qu’acte créateur, souligne Éric de Chassey, lequel devient un rituel, une méthode de concentration. C’est en réalité le quotidien de l’artiste.» Ne dit-on pas dans une certaine mesure qu’un bon écrivain écrit toujours le même livre ? Pourquoi n’en serait-il pas de même pour un artiste ? Répéter, c’est aussi disséquer en détail.