On connaît les vases et les meubles d’inspiration naturalistes de l’artiste lorrain, probablement moins ses pièces influencées par l’art oriental, produites dans les années 1880.
Telle une dentelle, Émile Gallé travaille la matière sur toute la surface du vase, à l’acide et à l’émail. Pris dans un réseau de branches épineuses parsemées de fleurettes blanches, nos cavaliers au grand galop semblent voler au-dessus des steppes aux faux airs de vagues… Comme un certain Philippe-Joseph Brocard – qui remporte un vif succès à l’Exposition universelle de 1867 avec ses pièces en verre d’inspiration perse et mauresque –, le chef de file de l’école de Nancy prête grande attention, quatre ans plus tard, aux vases islamiques du South Kensington Museum, où il représente son père à l’Exposition de Londres. Comme Brocard, Gallé va voir et revoir la collection de lampes de mosquée du musée de Cluny. On sait aussi qu’il possède un exemplaire de La Civilisation des Arabes, de Gustave Le Bon, paru en 1884. Sa maîtrise totale du matériau et son imagination font le reste. Cette même année, il triomphe à la huitième exposition de l’Union centrale des arts décoratifs (à Paris) où figurent des «émaux opaques associés aux couleurs à reflets avec adaptation au style persan», comme il le précise au jury. Des pièces «dans le goût de» voient le jour entre 1882 et 1889, rééditées dans les années 1900, inspirées de modèles islamiques en verre, mais aussi en terre et en métal. Gallé ou l’art de revisiter les enluminures de la Perse seldjoukide, les miniatures mogholes et la flore lorraine…